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La RCA veut juger Abdoulaye Miskine, le Tchad s'y oppose

Blaise Dariustone
4 juin 2020

La justice tchadienne a ouvert une information judiciaire contre le chef rebelle centrafricain d’origine tchadienne, Abdoulaye Miskine, ainsi que trois de ses compagnons, tous détenus à N’Djamena.

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Combattants centrafricains de la milice anti-balaka à Gambo dans le sud-est de la RCA
Combattants centrafricains de la milice anti-balaka à Gambo dans le sud-est de la RCAImage : Getty Images/AFP/A. Huguet

Le leader du Front démocratique du peuple centrafricain (FDPC), Abdoulaye Miskine, de son vrai nom Martin Koumtamadji, et trois de ses compagnons, avaient été interpellés à l’est du Tchad et conduit à N’Djamena en octobre 2019.  

A l’époque, Bangui avait dépêché à Ndjamena le ministre centrafricain de la Justice, Flavien Mbatta, en vue de négocier l’extradition de ces rebelles. Mais, le Tchad avait refusé. 

Huit mois après, la justice tchadienne décide finalement d’ouvrir une information judiciaire contre ces rebelles centrafricains. 

Que leur reproche-t-on concrètement ? Pour Maître Mognan Kembetiade, un des avocats des prévenus, ‘’On reproche à Abdoulaye Miskine et aux trois autres, l’infraction d’organisation de mouvement insurrectionnel et de viol, en 2004. Les conseils se réservent pour l’instant le droit de présenter les moyens de défense qui permettront aux juges de rendre une ordonnance digne de ce nom. Il n’a pas été  précisé s’il s’agit de viol commis sur le territoire tchadien ou en territoire centrafricain. Parce que nous n’avons vu aucune plainte annexée au procès-verbal d’enquête préliminaire. Dès l’instant où une information judiciaire est ouverte et le juge d’instruction saisi de l’affaire, je pense qu’on ne peut plus parler d’extradition‘’, explique l'avocat.

Camp de réfugiés à Kaga-Bandoro
Camp de réfugiés à Kaga-BandoroImage : picture-alliance/AP Photo/D. Belluz

Abdoulaye Miskine comme moyen de pression

Selon le juriste politologue Sitack Yombatina Beni, deux hypothèses justifieraient le refus des autorités tchadiennes d’extrader ces rebelles en Centrafrique :

"La première hypothèse plausible qu’on pourrait émettre est que le Tchad refuse qu’Abdoulaye Miskine puisse se retrouver de l’autre côté et fasse un certain nombre de confessions. La deuxième hypothèse qu’on peut émettre également, vue la tension entre la république centrafricaine et le Tchad, est que le Tchad garderait Abdoulaye Miskine et sa suite comme moyen de pression pour permettre de dénouer les relations entre les deux pays. Il aurait été plus facile de les renvoyer en Centrafrique et puis le Tchad pourrait aussi se constituer partie civile. Parce qu’Abdoulaye Miskine n’est pas seulement réclamé par la Centrafrique mais aussi par la Cour pénale internationale (CPI). "

Relations difficiles

Idriss Déby est accusé de déstabiliser la Centrafrique
Idriss Déby est accusé de déstabiliser la CentrafriqueImage : Getty Images/F.Belaid

Un avis que partage bon nombre de défenseurs tchadiens des droits humains, comme Sosthène Mbernodji, le Coordonnateur du mouvement citoyen pour la préservation des libertés, le MCPL. "Il faut que le Tchad arrête de s’impliquer dans les affaires centrafricaines. Abdoulaye Miskine doit être extradé en Centrafrique puisqu’il est centrafricain. On n’a pas assez de garantie pour que Miskine soit jugé et purge sa peine ici", estime Sosthène Mbernodji.

La DW a tenté sans succès, d’avoir l’avis des autorités judiciaires tchadiennes sur le sujet.

En 2003 et 2014, la République centrafricaine avait accusé le Tchad de soutenir des rebellions contre les différents pouvoirs qui se sont succédés en Centrafrique. Des accusations qui continuent jusque-là d’empoisonner les relations diplomatiques entre Bangui et N’Djamena.

Vue arienne de N'Djamena
Blaise Dariustone Correspondant au Tchad pour le programme francophone de la Deutsche Welledw_francais