Une centaine de voitures ont défilé en plein cœur de Bonn le dimanche 27 mars. La plupart des véhicules arboraient des drapeaux russes ou soviétiques en signe de soutien à la guerre en Ukraine. Certains manifestants s'affichaient aussi avec le symbole Z, mais ils étaient peu, comparés à d'autres manifestations. Sans doute parce que les autorités régionales de Rhénanie-du-Nord-Westphalie ont brandi la menace de poursuivre toute personne qui porte ce symbole en public.
Un Z pour rassembler les Russes derrière Poutine
Depuis le 24 février, le Z a envahi l'espace, en Russie et au-delà des frontières. Dans des spots à la télévision russe ou sur les réseaux sociaux, qui font la promotion de l'"opération spéciale" – le terme officiel pour l'invasion russe – menée par Vladimir Poutine en Ukraine, mais aussi sur des voitures, des bâtiments ou des vêtements.
Son origine n'est pas clairement établie – il est apparu dès le début de la guerre sur des blindés russes en Ukraine – mais il est rapidement devenu un emblème de la guerre de Vladimir Poutine.
Pour l'historien Guilhem Zumbaum-Tomasi, c'est une manière pour le président russe de rassembler une certaine catégorie de la population derrière lui.
"Toutes les formes de dictature ou de régime autoritaire ont besoin d'un symbole pour rassembler la population derrière eux. Certains disent que le Z représente la croix gammée cassée. A mon avis cela ne vient pas directement de Poutine. Ca a sûrement commencé ailleurs, puis Poutine a trouvé que c'était une manière de se distinguer du monde occidental et de l'Ukraine. S'ils essaient de trouver une forme de rassemblement, c'est pour rassurer les gens entre 30 et 50 ans. C'est une forme d'agressivité pour rassembler ces gens-là derrière Poutine et s'assurer qu'il n'y ait pas de virus démocratique dans ces milieux-là."
Malgré l'interdiction de la chaîne russe RT, le Z est apparu ces dernières semaines en Allemagne. Dans des manifestations, mais aussi sous forme de tags, sur une église en Bavière ou sur des voitures de réfugiés ukrainiens.
Le Z passible de poursuites pénales en Allemagne
La police enquête pour définir s'il s'agit d'actes qui pourraient relever de l'article 140 du code pénal allemand. C'est également sur cet article, qui menace de poursuites pénales toute personne qui "fait l'approbation de crimes", que certains Länder ont avancé la possibilité de traduire en justice toute personne qui utilise ce symbole dans l'espace public ou sur internet.
"Le Z qu'on porte sur ses vêtements est un symbole d'approbation de la guerre conduite en Ukraine par la Russie, c'est un acte délibéré", explique le professeur Christian Tomuschat, spécialiste du droit international. "Un pénaliste pourrait très bien prendre la position que porter le Z est un geste qui tombe sous le coup de cet article 140."
La peine encourue peut aller jusqu'à trois ans de prison. Et la notion d'approbation de crimes concerne aussi les violations du droit international, et dans le cas de la guerre de la Russie, l'agression est établie, souligne encore Christian Tomuschat.
"En droit international, l'agression est le plus grave crime qu'on connaisse et là il n'y a aucun doute. On sait que dans cette guerre d'agression, beaucoup de violations du droit humanitaire ont été commises: bombardements de civils, de quartiers résidentiels, attaques contre des hôpitaux, ce sont tous des actes criminels passibles de peines selon le droit allemand et international."
Peu de chance pour une interdiction
Certains en Allemagne vont encore plus loin en réclamant l'interdiction pure et simple du signe Z, à l'instar d'autres symboles comme la croix gammée. Mais selon Christian Tomuschat, c'est peu probable que cela arrive.
"Une interdiction pourrait être lancée, sans doute, mais les Länder n'ont pas envie parce qu'on entrerait dans des milliers de cas qu'il faudrait poursuivre alors cela engagerait les juridictions pénales pour une durée indéterminée."
Le gouvernement du Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie a confirmé qu'il n'avait pas l'intention d'interdire le symbole Z, d'après les déclarations faites par le ministre de la Justice du Land, Peter Biesenbach, à la chaîne WDR. Les obstacles juridiques sont trop élevés.
Cela n'empêchera pas toutefois pas les tribunaux régionaux d'examiner, au cas par cas, si l'utilisation du symbole "Z" fait la promotion d'une guerre contraire au droit international.
Comme beaucoup d'autres en Allemagne, l'historien Guilhem Zumbaum-Tomasi considère pour sa part que le débat de l'interdiction n'est pas la priorité actuellement.
"Quand je vois que l'UE n'arrive toujours pas à s'entendre pour accueillir les réfugiés ukrainiens, je me dis qu'il y a des discussions plus utiles et nécessaires que cette histoire de Z."
Origines possibles du Z
Le Z, c'est une des lettres aperçues sur des blindés russes, aux côtés de A, O ou V… Différentes lettres, écrites en alphabet latin, qui définissent différentes zones d'intervention – c'est l'une des théories. Selon des experts militaires, elles serviraient également à éviter aux forces russes de viser leurs propres troupes.
Mais le Z symbolise aussi la victoire dans l'expression russe "Za podebu" – "Pour la victoire". Et le Z est surtout devenu un instrument de propagande pour le pouvoir russe.
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Pour de nombreux migrants, le rêve britannique s'arrête à Grande Synthe
En 2021, plus de 28 000 personnes ont tenté de rejoindre l’Angleterre, soit trois fois plus que l’année précédente.
Plusieurs camps clandestins se sont créés le long de la côte dans le Nord de la France, de Boulogne-sur-Mer jusqu’à la frontière belge. Des centaines de migrants s’y sont installés dans l’espoir de pouvoir un jour traverser la Manche.
Ces camps sont régulièrement démantelés par la police. Faute d’alternative, les migrants s’y réinstallent dans la foulée. C’est le cas du camp de Grande Synthe, coincé entre une route départementale et une zone industrielle.
Les migrants y vivent dans des conditions insalubres, sans eau courante ni électricité. Quelques associations apportent de l’aide avec des cuves ou des générateurs, mais le quotidien reste difficile. Niklas Mönch s'est rendu sur place pour Vu d'Allemagne.
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