Levée de brevets sur les vaccins : l'Europe se défend
21 février 2022C'est l'un des thèmes au centre de la visite du président allemand Frank-Walter Steinmeier au Sénégal en ce début de semaine : la production de vaccins en Afrique. Cela fait suite à l'annonce récente de la firme allemande BioNtech de l'envoi prochain d'unités de production mobile vers plusieurs pays : le Rwanda, le Sénégal et éventuellement aussi l'Afrique du Sud.
La question de la production des vaccins sur le continent a aussi été discutée lors du sommet entre l'Union européenne et l'Union africaine la semaine dernière.
L'ouverture d'unités de production dans six pays africains a été officiellement annoncée par l'ONU. L'Afrique du Sud, l'Egypte, le Kenya, le Nigeria, le Sénégal et la Tunisie sont concernés. Cela veut dire qu'on va produire dans ces pays des vaccins à ARN messager contre la Covid-19.
"Nous ne voulons pas des miettes"
L'Union européenne parle de transfert de technologie. Des gens seront formés sur place pour produire les vaccins. Un premier pas salué des deux côtés de la Méditerranée. Mais cela ne vas pas assez loin pour certains.
Le président sud-africain Cyril Ramaphosa réclame une levée complète des brevets des vaccins anti-Covid-19. Ce serait, pour faire simple, l'étape après le transfert de technologie, l'étape ultime.
"A mon avis, lorsque nous sommes confrontés à une pandémie comme celle-ci, ce qui nous permet d'en sortir devrait être considéré comme un bien public", répète Cyril Ramaphosadans une interview à la Deutsche Welle. Il s'était déjà exprimé dans le même sens par le passé. "Il ne faut pas le considérer comme un instrument ou un produit à but lucratif. Ce devrait être facilement disponible. Nous ne voulons pas recevoir des miettes."
"Protéger la recherche"
Mais ce sujet bloque toujours, malgré les discussions lors du sommet UA-UE la semaine dernière. L'Union européenne s'y oppose. Tout comme l'Allemagne, siège de BioNTech. Une position défendue au micro de la DW par la ministre fédérale de la Coopération économique, Svenja Schulze. "Ceux qui veulent la levée des brevets, veulent démarrer le plus rapidement possible la production en Afrique. Mais en fait il y a deux manières de faire cela : on peut le faire en confrontation avec les entreprises ou en coopération", développe-t-elle. "Moi, je pense que nous devons choisir la voie la plus rapide, c'est à dire la coopération. Un vaccin à ARN messager nécessite 50.000 étapes dans l'assurance qualité. Pour cela, il faut des personnes très bien formées, du savoir-faire."
Des arguments repris et développés par l'Union européenne qui insiste : il faut protéger la propriété intellectuelle pour pouvoir continuer à créer. Dit autrement, cela signifie que si on lève les brevets, les entreprises gagneront moins d'argent et n'investiront plus dans la recherche.
Sans donner de date précise, l'Union européenne et l'Union africaine assurent toutefois que les discussions sur le sujet ne sont pas closes. Et parlent d'un rendez-vous au printemps sur la question.
En attendant, en plus de la mise en place des unités de fabrication, l'Union européenne promet aussi de livrer encore des doses d'ici l'été pour accélérer les campagnes de vaccination.
L'Europe va aussi mobiliser aussi 425 millions d'euros pour accélérer les campagnes de vaccination, en soutenant la distribution des doses et la formation d'équipes médicales.
Pour l'heure, un peu plus de 11% de la population est vaccinée sur le continent africain.