Bukina Faso : dans les coulisses de Radio Oméga
18 septembre 2023Tôt le matin, à 5 h00, ce dimanche, (17 septembre), Dénis Zoungrana, journaliste et animateurde l'émission "Dimanche politique ", prépare ses lancements pour l'édition du journal de 6 h15 qui arrive juste avant son émission. Après le journal, Dénis revoit les derniers réglages de l'émission "Dimanche politique " en attendant son invité, l'ancien maire d'Arbinda, Boureime Wereme, pour débattre de la situation sécuritaire. Dénis l'a déjà annoncé sur les antennes. Mais hélas, ce dernier a finalement annoncé son indisponibilité.
Il est de plus en plus difficile d'avoir sur les plateaux des invités pour débattre de sujets liés soit à l'actualité ou à des sujets de développement. Tous préfèrent rester dans le silence, regrette Dénis Zoungrana.
"Franchement, pour ce qui est de l'émission de Dimanche politique, souvent on a envie de jeter l'éponge parce qu'on a de moins en moins d'experts qui acceptent de donner des interviews. Je ne vais pas citer leurs noms, ils sont très nombreux qui étaient assez pointus dans les analyses. Pour ce cas précis aussi, l'invité a eu des arguments pour s'excuser, on a essayé de faire comprendre qu'on l'a annoncé, mais il a préféré trouver ses arguments. Ce n'est pas la première fois" , confirme le journaliste à la DW.
Retour sur les ondes mais...
Le personnel de Radio Oméga, journalistes, reporters, animateurs ont tous retrouvé le sourire une semaine après la reprise des programmes de la radio.
Un ouf de soulagement pour ces hommes de radio qui retrouvent enfin leur micro, leur passion pour toujours servir l'opinion nationale d'une information de qualité et équilibrée.
Certes, la radio reprend ses programmes, mais le personnel y voit un goût d'inachevé puisqu'ils attendaient impatiemment le verdict du tribunal administratif.
"Je suis satisfait de pouvoir reprendre le travail, de pouvoir remettre une partie de l'équipe au travail puisqu'on avait fait un réaménagement pour permettre à tout le monde de continuer à contribuer pour la télévision et les plateformes digitales. Mais il est clair qu'il y a quelques-uns des collaborateurs qui n'interviennent plus à la radio et qui retrouvent leur outil principal de travail comme moi. C'est un soulagement pour nous, on est heureux de pouvoir retrouver notre micro, mais nous sommes toujours convaincues que le préjudice doit être compensé puisque nous estimons que la mesure était illégale et illégitime", ajoute Abdoul Fatve Tiemtoré rédacteur en chef de radio Oméga.
La levée de la suspension des programmes de Radio Oméga au moment où le média n'a pas retiré sa plainte au tribunal administratif, donc la procédure judiciaire suit son cours, explique Maître Séraphin Somé, avocat de Radio Oméga, qui se dit surpris.
"Ce communiqué nous l'avons accueilli dans la surprise générale parce que les faits qui sont reprochés à Oméga en apparence semblent très graves pour justifier que finalement on néglige le Conseil supérieur de la communication pour s'arroger le pouvoir en tant que gouvernement de prendre une décision aussi grave consistant à suspendre l'ensemble des programmes de Radio Oméga et ce jusqu'à nouvel ordre. Je rappelle que Oméga a déjà saisi le tribunal administratif de Ouagadougou et était dans l'attente d'une décision visant à annuler cette décision de suspension que nous considérons comme illégale", ajoute Maître Séraphin Somé.
Les fidèles auditeurs sont heureux de la reprise des programmes. Salif Sawadogo écoute Radio Oméga depuis 2015. Il est venu encourager le personnel.
"Un matin, j'ai capté la radio et j'ai entendu une musique et je me suis dit que c'était une erreur et c'est en captant la radio Savane FM que j'ai appris que la radio a repris. La solution est qu'ensemble il faut s'entendre. Ce n'est pas en fermant les radios qu'on arrivera à combattre les groupes armés terroristes."
Toujours équitable dans le traitement
La Radio Oméga ne traitera pas l'information différemment liée à l'actualité nationale. Elle sait aussi qu'en période de crise, sa responsabilité pour une information de qualité et équilibrée demeure un des fondements de la déontologie du métier du journalisme, confirme Abdoul Fatave Tiemtoré.
"On a bien repris dès les éditions du matin 6 H15. On poursuit et on compte continuer à travailler avec toujours un point d'honneur sur toutes les règles qui entourent la pratique de notre métier."
Radio Oméga avait été suspendue le 10 août 2023 et n'a plus émis durant un mois pour avoir diffusé une interview d'un ex-rebelle nigérien sur ses antennes. Le gouvernement dit avoir pris cette décision en toute responsabilité, motivée par des manquements de ce média aussi bien au plan de l'éthique que de la déontologie qui gouvernent l'exercice du journalisme. Le Capitaine Ibrahim Traoré, président de la transition, reste ferme et tient à ce que tout organe de presse au Burkina s'aligne derrière la communication gouvernementale. Il s'oppose à toute communication qu'il qualifie de " propagande terroriste".