L'invité de la semaine de la DW est le représentant du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) au Burkina Faso.
En proie aux attaques terroristes, de nombreux Burkinabè ont quitté leurs localités d’origine pour se retrouver au sein de nouvelles communautés ; une situation qui engendre des défis majeurs à relever selon le représentant local du HCR, Abdouraouf Gnon-kondé, au micro de notre correspondant à Ouagadougou Richard Tiéné.
DW: Quelle est la situation actuelle des réfugiés et déplacés internes au Burkina Faso?
Abdouraouf Gnon-kondé : Au Burkina Faso, d’après les chiffres du Conseil National de Secours d’Urgence et de Réhabilitation (CONASUR) qui est l’organe étatique qui coordonne l’action humanitaire, les dernières mises à jour au niveau des statistiques indiquent à environ 2 millions de personnes soit un Burkinabè sur dix est affecté par la situation de déplacement forcé.
Il faut aussi ajouter à cela que nous avons à peu près 32.500 personnes qui sont en situation de demande d’asile et de réfugiés qui viennent principalement du Mali et qui sont présents sur le territoire burkinabè.
Nos efforts en tant qu’acteurs de la communauté des humanitaires peuvent compléter les efforts que font les autorités et surtout les populations.
Que font exactement les populations dans ce domaine ?
Elles font des choses extraordinaires et elles sont le pilier de la réponse que nous essayons d’apporter.
Une stratégie que nous avons dans nos approches opérationnelles est de travailler énormément avec les communautés qui connaissent mieux les problèmes qui sont au courant et qui maitrisent mieux l’environnement. Par exemple recevoir des populations et donner accès aux abris ce sont les communautés qui s’en occupent.
Le Conseil supérieur de la défense nationale, sous la présidence du chef de l’État Paul-Henri Damiba, a décidé de la création de deux zones d’intérêt militaire, dans l’est et lenord du pays notamment. Toute présence humaine y est interdite. Objectif : y mener des opérations contre les groupes armés terroristes. Quel est l’avis du HCR au sujet de cette décision ?
Le HCR n’a pas à commenter une décision souveraine des autorités du Faso. Elles le prennent pour le bien des populations civiles. Notre rôle en tant que membre du système des Nations Unis avec les autres acteurs du système des Nations Unis, c’est de comprendre un peu les modalités pratiques…
Vous êtes certain que c’est pour le bien des populations civiles ?
Comme je le disais pour nous, nous avons besoin de comprendre davantage les modalités pratiques qui seront prises et voir concrètement quel pourrait être le support qu’une entité comme le HCR à l’instar d’autres acteurs pourrait apporter.
Il est question de corridor ou on laissera passer les populations, est-ce que déjà vous avez une stratégie ? Les opérations militaires peuvent se mener à tout moment est-ce que vous anticipez ou ien vous attendez que les autorités vous reviennent pour vous expliquer leur démarche ?
Nous faisons ce que nous avons toujours fait. Dans pareilles circonstances, nous travaillons à mieux comprendre ces modalités pratiques aussi bien au niveau national que sur le terrain parce que je crois savoir que ses mesures vont toucher essentiellement deux régions : la région du sahel et la région de l’est. Il nous faut comprendre ici au niveau de Ouagadougou et dans les régions qui ont été citées comment concrètement nous allons opérationnaliser et quelss pourraient être l’appui et l’apport des acteurs humanitaires, y compris le HCR.
Quelles sont les difficultés majeures que vous rencontrez sur le terrain ?
Nous sommes dans un contexte où la première des difficultés qui me vient à l’esprit c’est la question de l’accès aux populations. L’accès et une contrainte pour plusieurs raisons. En tant qu’acteurs de protection, si on n’a pas accès, on ne connait pas les populations, on n’a pas l’information qui nous permet d’informer nos interventions.
La deuxième des difficultés vu le niveau de vulnérabilité auquel les populations sont exposées c’est disposer davantage de ressources qui nous permettent de pouvoir mettre en œuvre des réponses à même de prendre en charge cette vulnérabilité. Aujourd’hui par exemple, pour le HCR, pour nos besoins en 2022 qui tourne à peu près autour de 110 millions de dollars, nous ne sommes financés qu’à hauteur de 20% et nous voyons donc le niveau de déplacement accru de personnes affectées par le déplacement forcé.
On peut imaginer toute la réponse qui sied pour ces femmes, pour ces enfants, pour toutes ces personnes, ce que cela commande d’avoir comme ressources.