La CAN 2023 sera-t-elle la plus disputée de l'histoire ?
12 janvier 2024La Coupe d'Afrique des Nations de football masculin a beau être l'une des plus vieilles compétitions de l'histoire du football (le premier tournoi a eu lieu en 1957), elle n'en reste pas moins un tournoi dont le vainqueur final est toujours aussi difficile à prédire.
Il n'y a qu'à se pencher sur les statistiques : en 33 éditions, 15 pays différents ont soulevé le prestigieux trophée continental. Presque toutes les grandes nations du football africain ont remporté la CAN, et même d'autres, plus modestes, sont parvenues à créer la surprise, comme la Zambie en 2012.
S'il est vrai que ces dernières années, la victoire finale est revenue aux grands favoris comme le Sénégal (lors de l'édition 2021) ou l'Algérie (en 2019), l'histoire a montré que tout était possible durant la Coupe d'Afrique des Nations.
Il n'y a qu'à demander à Didier Drogba, l'un des meilleurs footballeurs de l'histoire du continent africain, qui n'est jamais parvenu à soulever le trophée alors qu'il faisait partie de la génération dorée de la Côte d'Ivoire (les frères Kolo et Yaya Touré, Didier Zokora...).
Cette année, l'issue de cette Coupe d'Afrique des Nations est encore plus difficile à prédire, selon Sadio Mané.
"Cette compétition sera l'une des plus compliquées depuis que j'y participe, parce que toutes les grandes nations sont là et elles ont toutes leurs objectifs", a déclaré l'ancien attaquant du Bayern Munich à cafonline.com.
Pas de favori qui se distingue
Sadio Mané essaye-t-il de faire retomber la pression, étant donné que le Sénégal, champion en titre, est particulièrement attendu cette année ? Peut-être. Cela ne signifie pas pour autant qu'il a tort.
Pour la première fois depuis plusieurs éditions, il n'y aura pas de grand favori en Côte d'Ivoire.
Il faudra bien évidemment observer de près les prestations du Sénégal, "parce que c'est peut-être une équipe moins attractive que d'autres, d'un point de vue du jeu, ça reste une équipe qui a l'habitude d'aller loin et de faire le nécessaire pour se qualifier pour les tours suivants", explique Ibrahima Traoré, ancien joueur de Bundesliga et ex-capitaine de la Guinée.
Mais les Lions ne boxent pas seuls dans leur catégorie. D'autres nations ont également des arguments à faire valoir.
Le Maroc, par exemple, voudra prouver à tous que son parcours lors du Mondial 2022 au Qatar (au cours duquel les Lions de l'Atlas ont terminé quatrièmes) n'était pas dû au hasard.
L'Egypte peut compter sur un groupe solide composé de joueurs d'Al Ahly et du Zamalek - deux des plus grands clubs du continent - qui fera tout pour que sa star, Mohamed Salah, remporte son premier trophée continental.
Champion d'Afrique en 2019, l'Algérie se présente au tournoi avec un esprit de revanche, notamment suite à son élimination au premier tour lors de la dernière CAN au Cameroun.
Quant au Nigeria, dont le dernier sacre continental remonte à 2013, il fait lui aussi partie des équipes à surveiller. Menés par Victor Osimhen, fraîchement auréolé du titre de "footballeur africain de l'année", les Super Eagles se pointent en Côte d'Ivoire avec une impressionnante armada offensive (Moffi, Lookman, Chukweze, Iheanacho).
Cette qualité en attaque pourrait malgré tout ne pas être suffisante dans un tournoi aussi dense. L'équipe est toujours "quelque peu à la peine", estime Jay Jay Okocha. "Nous ne sommes pas assez réguliers", a déclaré l'ancien maître à jouer de l'Eintracht Francfort à la DW.
Par ailleurs, d'autres équipes semblent en mesure de réaliser quelque chose de grand dans ce tournoi, à l'image du Cameroun, du Ghana, du Mali, du Burkina Faso (trois fois demi-finaliste sur ses quatre dernières participations), de la Tunisie, et bien évidemment de la Côte d'Ivoire, le pays hôte.
Un avantage de jouer à domicile pour la Côte d'Ivoire ?
Sur un continent où les disparités peuvent être grandes entre les nations (en termes de climat, de la qualité des infrastructures, des terrains), jouer à domicile a longtemps été un avantage pour le pays hôte.
Mais de nos jours, évoluer à la maison n'est plus forcément une garantie de succès. La dernière équipe à avoir soulevé le trophée continental chez elle est l'Egypte, en 2006, il y a neuf éditions de cela. Aucune équipe n'y est parvenue depuis, ne serait-ce que jouer une finale devant son propre public.
Qu'en est-il de la Côte d'Ivoire ? Malgré l'avantage de jouer sur leur propre sol, les Eléphants ne sont pas tout à fait vus comme des favoris, si l'on en croit Idriss Diallo.
"Nous sommes en pleine reconstruction. Si vous regardez notre équipe, je dirais que 30% des joueurs sont très jeunes, ce sera leur première compétition. Mais nous essayons néanmoins de construire une bonne équipe et faire en sorte d'être prêts", a confessé le président de la FIF (la Fédération Ivoirienne de Football) au magazine FourFourTwo.
Le bon point, c'est que l'équipe nationale de Côte d'Ivoire travaille bien en ce moment. En tant qu'équipe hôte, les Eléphants n'ont pas eu à passer par les qualifications. Ils ont toutefois réalisé une bonne série de matchs amicaux, avec une seule défaite en 2023 (3-0 contre la Zambie), un nul face au Maroc (1-1) et viennent de conclure leur préparation à la CAN avec une victoire 5-1 face à la Sierra Leone.
"Nous voulions être dans les conditions de la CAN, nous voulions souffrir en raison du travail, de la chaleur. Nous avons vu comment le groupe a réagi à la dose d'efforts et le résultat est très positif", a déclaré le coach Jean-Louis Gasset lors d'une conférence de presse.
La Côte d'Ivoire n'a certes pas de génération dorée cette fois-ci, mais les Eléphants savent qu'ils pourront compter sur le soutien massif de leurs supporters. Une véritable marée orange va déferler sur tout le pays.
Des stars ravies d'être à la CAN
Etant donné que ce tournoi n'a pas de favori qui se démarque, il y a beaucoup de stars qui feront tout pour aider leur pays à atteindre son objectif. Le point commun entre Victor Osimhen (Nigeria), Mohamed Salah (Egypte), Sadio Mané (Sénégal), Mohammed Kudus (Ghana) ou encore Serhou Guirassy (Guinée) ? Tous ces joueurs évoluent dans les plus grands championnats européens.
Même si ces joueurs vivent et jouent à l'étranger depuis des années - et que certains d'entre eux ont même remporté de prestigieux titres, comme la Ligue des champions - gagner la CAN reste leur but ultime.
Quand Sadio Mané a soulevé le trophée il y a deux ans, l'attaquant sénégalais a déclaré que c'était tout simplement "le plus beau jour" de sa vie. "J'ai gagné la C1 ainsi que d'autres trophées mais celui-ci est spécial pour moi. C'est tout simplement plus important pour moi".
La CAN se déroule en plein milieu de la saison (européenne), ce qui a le don d'agacer plusieurs clubs. Mais pour les joueurs concernés, rejoindre son équipe nationale, même si cela signifie quitter leur club et manquer des matchs importants, est une évidence.
Edmond Tapsoba a beau vivre une saison de rêve avec le Bayer Leverkusen, le défenseur du Burkina Faso rappelle que la Coupe d'Afrique des Nations "est une compétition spéciale pour n'importe quel joueur africain".
"Quand je jouais en Bundesliga, on m'a déjà fait comprendre que ce serait mieux si je ne me rendais pas à la CAN et que je restais dans mon club", raconte Ibrahima Traoré. Pas une option viable, pour l'ancien ailier du VfB Stuttgart et du Borussia Mönchengladbach.
"Il y a une certaine fierté à représenter ton pays. Lors de certaines éditions, j'étais même capitaine de l'équipe nationale, donc pour moi, il n'y avait aucune discussion possible : c'était tout simplement impossible pour moi de rater une compétition telle que la CAN."