Cinéma : l'Afrique peine à s'imposer à l'international
26 mars 2022C'est dans la nuit du dimanche 27 au lundi 28 mars que l'on connaîtra les vainqueurs de la 94e cérémonie des Oscars, les récompenses cinématographiques américaines décernées annuellement à Los Angeles.
Pour cette 94e cérémonie des Oscars, dix pays africains ont soumis leurs productions dans la catégorie du meilleur film international.
En 2006, l'Oscar étranger a été attribué à un pays africain, l'Afrique du Sud, avec "Tsotsi", mais c'est une exception.
En règle générale, le trophée tant convoité dans la catégorie "Meilleur film international", décerné depuis 1948, revient à un pays européen.
Lire aussi →Le cinéma africain à l'affiche de la Berlinale
Seulement trois Oscars
Au cours des 15 dernières années, des films non européens ont certes remporté ce trophée mais les cinéastes africains ne figurent que rarement parmi les lauréats : en près de 75 ans, seuls trois Oscars de cette catégorie leur ont été attribués.
Sur les trois lauréats africains, deux étaient des coproductions françaises : "Z" et "Noirs et Blancs en couleur".
Ces coproductions ne sont pas surprenantes compte tenu du passé colonial, selon le cinéaste nigérian, Steve Ayorinde. Grâce à cette collaboration, plusieurs films dit-il, ont bénéficié de l’influence du lobby cinématographique français à Hollywood.
"Sans collaboration, sans aucun soutien, sans l'investissement d'une grande institution ou d'une société de production européenne ou américaine, il est difficile de promouvoir un tel film à l'international. La francophonie est un exemple de coopération, un exemple de soutien du gouvernement français à des cinémas de pays tels que le Mali, le Burkina, le Sénégal, le Togo, ou le Cameroun. Grâce au soutien de la France, le lobbying est mené par une institution de financement tel que le Fonds sud", dit le cinéaste.
Lire aussi →Le Fespaco souffle ses 50 bougies
Obstacles linguistiques
Ce n'est qu'en 2006 qu'un film africain non francophone, un film sud-africain, "Tsotsi", a remporté le prix du meilleur film étranger. Réalisé par Gavin Hood, il s’agit jusqu'à présent du seul film africain récompensé qui n'a pas été produit en langue française.
La langue joue aussi un rôle important selon le cinéaste nigérian. Pour Steve Ayorinde, le kiswahili ou le zoulou par exemple sont connus en Afrique mais pas au niveau international, notamment dans le milieu du cinéma.
L'avantage que les films européens ont, dit le cinéaste, c'est que des langues comme l'allemand, le français, l'espagnol ou l'italien sont déjà des langues internationales. Ainsi, ceux qui jugeront les films sont déjà familiarisés avec ces langues.
Lire aussi →Issaka Sawadogo : "Le cinéma africain ne se porte pas bien"
Quid du cinéma nigérian ?
Le cinéma nigérian reste étrangement absent à l'affiche, lui qui qui produit environ 2.500 films par an avec l'industrie de Nollywood.
Mais, les films de Nollywood ne répondent pas aux exigences techniques d'un film de cinéma, car l'accent est mis sur la télévision, explique Steve Ayorinde.
Les services de streaming comme Netflix pourraient cependant changer la donne avec de bons films visionnés à domicile et de bonne qualité cinématographique.
La poursuite de cette pratique dépendra toutefois du nombre d'abonnements que Netflix pourra obtenir au Nigeria et en Afrique en général.
Mais, même si les productions Nollywood améliorent leur qualité, cela n'augmentera pas forcément leurs chances d'être nommées aux Oscars ou de gagner. Les conditions imposées par l'Académie, comme le fait qu'un film doive être projeté au cinéma, continuent d'exclure les productions de Nollywood.
Pour être nommés aux Oscars, un film doit être sorti en salle dans le comté de Los Angeles en Californie, entre le 1er janvier et le 31 décembre de l'année précédant la cérémonie.
Depuis 1929, c'est l'Academy of Motion Picture Arts and Sciences qui gère l'attribution des prix de la cérémonie des Oscars.
Lire aussi →MultiChoice, des films proches des réalités africaines
Les films africains en compétition
Pour cette 94e édition, l’Afrique du Nord sera représentée par des films venus de l’Algérie, l’Egypte, le Maroc et la Tunisie.
Il s’agit des films "Héliopolis" de Djaffar Gacem pour l’Algérie , "Souad " d’Ayten Amin pour l’Egypte, " Haut et fort " de Nabil Ayouch pour le Maroc et "Papillon d’or " d’Abdelhamid Bouchnak pour la Tunisie.
L’Afrique subsaharienne, elle compte six candidatures. Ce sont, "La Femme du fossoyeur " du Somalien, Khadar Ayderus Ahmed, " Hidden Dreams " du Camerounais Ngang Romanus, " Lingui, les liens sacrés " du Tchadien Mahamat-Saleh Haroun, "Barakat " de la Sud-Africaine Amy Jephta, le film malawite "Fatsani - A Tale of Survival " de Gift Sukez Sukali et le film kenyan "Mission to Rescue" de Gilbert Lukalia.
Lire aussi →Le MICA, un incontournable pour les professionnels du cinéma