Controverse autour d'une "loi sur l'islam"
3 avril 2017Ça y est! La campagne électorale est lancée en Allemagne. A quoi le remarque-t-on ? Les sujets sensibles sont mis sur la table et les partis politiques s'écharpent sur leurs idées de réformes. L'un des derniers sujets de dispute en date : l'islam. Avec une discussion animée au sein du camp conservateur sur la nécessité d'intégrer dans le programme électoral de la CDU/CSU (parti d'Angela Merkel) un projet de loi destiné à définir les droits et devoirs des musulmans d'Allemagne. Une idée qui fait bondir l'opposition.
Le contenu en résumé
Qu'est-ce que c'est que cette loi sur l'islam ? Les principales propositions concrètes sont les suivantes : un enregistrement des lieux de culte et des associations confessionnelles des musulmans d'Allemagne, l'interdiction d'un financement venu de l'étranger pour ces structures. Par ailleurs, le texte doit réguler les modalités des funérailles religieuses et le recours à un imam pour les prisonniers.
L'idée d'une loi sur l'islam émane d'un certain Jens Spahn, élu CDU. Elle traduit, cette idée, le désir de certains conservateurs, de mieux contrôler ce qui se passe dans les mosquées d'Allemagne et d'éviter la radicalisation religieuse au sein de la communauté musulmane du pays. Certaines figures du parti ont appuyé cette suggestion d'une « loi sur l'islam », à l'instar de la vice-présidente.
Une proposition anticonstitutionnelle?
L'opposition critique la dangerosité du projet. Omid Nouripour, élu écologiste, lui-même musulman, exprime au micro du Deutschlandfunk son incompréhension et sa colère envers une idée qu'il juge discriminatoire:
« C'est en opposition totale avec la loi fondamentale actuelle, qui proclame l'égalité entre les religions. Ça montre que la CDU ne sait plus quoi inventer et qu'ils multiplient les pitreries dès qu'il s'agit des musulmans et de l'islam. »
Le parti social-démocrate membre de la coalition au pouvoir s'inscrit lui aussi en faux. Pas question de soutenir un tel projet de la CDU. Le vice-président du SPD, Olaf Scholz, pose la question de la constitutionnalité même d'une « loi sur l'islam ». Si on légifère, alors uniformément pour toutes les religions. Le Conseil des musulmans parle d'un populisme qui rend tous les musulmans suspects a priori.
Au sein même du parti conservateur, les dissensions sont grandes. Le chef du groupe parlementaire de la CDU, Volker Kauder, et l'ancien secrétaire-général du parti ont qualifié le projet d' « idée populiste et saugrenue ». Beaucoup mettent en garde contre l'instrumentalisation d'une minorité à des fins électoralistes.
Devant le tollé général, le porte-parole du gouvernement à majorité CDU a dû préciser qu'aucune « loi sur l'islam » n'était pour l'heure à l'ordre du jour.