Dilemme de loyauté pour l'Allemagne sur le nucléaire iranien
11 mai 2018Angela Merkel et Vladimir Poutine se sont parlés au téléphone, une semaine avant leur rencontre du 18 mai à Sotchi, en Russie. Les deux dirigeants ont trouvé au moins un sujet, après des mois de tensions, sur lequel s'accorder : le président russe et la chancelière allemande sont tous les deux favorables au maintien de l'accord sur le nucléaire iranien, après le retrait des Etats-Unis.
Terrain d'entente avec le Kremlin
Au-delà des nombreux sujets qui fâchent, comme l'Ukraine, la Syrie ou l'affaire de Skripal, du nom de l'espion russe empoisonné en Grande-Bretagne, Moscou et Berlin tombent d'accord sur la nécessité de sauver l'accord conclu en juillet 2015 entre l'Iran d'un côté et de l'autre le groupe 5+1 (Allemagne, Chine, Etats-Unis, France, Royaume-Uni et Russie).
Un accord qui est le résultat de douze longues années de négociations, comme l'a rappelé Angela Merkel qui doit ménager la chèvre iranienne et le chou américain : "Je continuerai à m'engager autant que possible pour le partenariat transatlantique, a déclaré la chancelière vendredi matin. "Et nous devons voir avec l'Iran comment faire vivre cet accord même si un géant économique n'y participe plus."
Heiko Maas, le chef de la diplomatie allemande, avait déjà réitéré, cette semaine, son attachement à l'accord, au nom de la stabilité "dans une région déjà largement en proie à des crises et des conflits" et "en coopération étroite avec les partenaires européens".
Une diplomatie sans les Etats-Unis?
Le texte du Plan d'action global commun prévoit que l'Iran gèle son programme nucléaire pendant dix ans, en échange de quoi les sanctions internationales qui pesaient sur la République islamique étaient levées.
Il s'agit donc de contrer l'annonce de Donald Trump qui veut que les Etats-Unis sortent de l'accord avec l'Iran et rétablissent les sanctions. Réinventer une diplomatie internationale en dépit des positions de Washington sur l'Iran, le Proche-Orient, les taxes douanières sur l'aluminium et l'acier.
Ne pas froisser Washington
Mais Washington reste un allié incontournable de l'Allemagne et de l'UE, un allié qu'il ne faut pas froisser. Comment alors ignorer ou contourner d'éventuelles sanctions économiques américaines en Iran ?
La position est d'autant plus inconfortable pour Berlin et Bruxelles que les manifestations organisées ce vendredi 11 mai en Iran pour protester contre la décision américaine ont exprimé une hostilité, attisée par certains prédicateurs comme l'Ayatollah Ahmad Khatami dans son prêche du vendredi : "Le saint régime de la République islamique d'Iran va mobiliser ses capacités de missile au quotidien pour qu'Israël, ce régime d'occupation, perde le sommeil et soit assailli de cauchemars au point de le rendre fou, nous allons rayer Tel Aviv et Haïfa de la carte", a-t-il menacé.
Efforts européens
Etats-Unis/Israël d'un côté, Turquie/Russie/Iran de l'autre. Un grand écart difficile pour l'Allemagne, à quelques jours du déménagement de l'ambassade américaine en Israël de Tel Aviv à Jérusalem.
La cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini recevra mardi les ministres des Affaires étrangères de l'Allemagne, de la France et du Royaume-Uni, qui seront ensuite rejoints par leur homologue iranien.
De son côté, l'Iran accuse Israël "d'inventer des prétextes" pour frapper en Syrie. Hier, des raids israéliens ont été menés contre des cibles iraniennes présumées et syriennes.