Elections électriques en Turquie
28 mars 2014Ce devait être un scrutin local, mais la campagne électorale s'est transformée en véritable plébiscite pour, ou contre le premier ministre Recep Tayyip Erdogan... Embourbé dans les scandales de corruption, lâché par son ancien allié, l'imam Fethullah Gülen, le premier ministre a multiplié les grands rassemblements populaires, dénonçant les complots contre lui, contre son parti, l'AKP, au risque d'oublier qu'il s'agit bien d'élections municipales. C'est d'ailleurs le reproche que fait Defne, une habitante du quartier de Besiktas à Istanbul :
« C'est censé être des élections locales mais il y a eu tellement d'affaires et elles ont pris de telles proportions que tous se comportent comme s'il s'agissait d'élections législatives. Mais nous ne résoudrons nos problèmes qu'avec les élections législatives, c'est à ce moment-là que nous trouverons une solution. »
Scrutin test
C'est le premier scrutin dimanche depuis la répression des événements de Gezi au printemps dernier, et c'est un test pour le régime de Recep Tayyip Erdogan, avant la présidentielle prévue en août et les législatives en 2015. Le régime est plus fragilisé que jamais et multiplie les réactions autoritaires. On l'a vu avec le blocage de Twitter depuis une semaine et de youtube depuis hier, par crainte de fuites et de révélations embarrassantes.
Malgré tout le parti du premier ministre devrait rester le premier parti du pays dimanche soir : l'AKP peut toujours compter sur une grande base électorale, notamment dans les quartiers populaires comme dans celui de Tophane à Istanbul.Selim, un épicier, est lui certain de la victoire du premier ministre ce dimanche :
« Ici, nous pensons que l'AKP va gagner à nouveau. C'est mon avis, d'ailleurs je ne crois pas une minute aux accusations de corruption. »
Reste que selon les sondages l'opposition a cette fois-ci une chance de reprendre Ankara et Istanbul, les deux plus grandes villes du pays... Ce serait une gifle pour le premier ministre, ancien maire d'Istanbul lui-même. Chose certaine, le régime est nerveux, la société turque est plus polarisée que jamais, et ce scrutin sera déterminant pour la suite du calendrier électoral. C'est une hypothèse de plus en plus évoquée : selon les résultats, Recep Tayyip Erdogan pourrait bien décider de déclencher des législatives anticipées.