En Allemagne, sous les nazis, il suffisait d’un baiser ou même d’un regard considéré comme concupiscent pour être emprisonné en tant qu’homosexuel.
Les cas de "fornication grave" étaient même passibles de peines de réclusion pouvant aller jusqu'à dix ans. Environ 100.000 personnes homosexuelles ont été déportées, torturées et assassinés dans les camps de concentration et d’extermination sous le Troisième Reich.
Pour en savoir davantage sur l’homosexualité de certains nazis et sur l’homophobie affichée par l’extrême-droite d’alors, je vous renvoie à la lecture d’un essai d’Yves Müller sur la page bpb.de – disponible en anglais aussi. L’auteur y revient sur l’ambiguïté de l’extrême-droite, souvent masculiniste – vis-à-vis de l’homosexualité (surtout masculine). Un sujet qui divise les militants et les dirigeants de ces partis jusqu’à aujourd’hui.
Rappelons au passage qu’Ernst Röhm, le chef de la SA, était plus ou moins ouvertement homosexuel. Ce qui n’a posé aucun problème à Hitler pendant des années – mais qui est devenu l’un des arguments officiels pour légitimer son assassinat et la dissolution des SA après la nuit des longs couteaux – en fait pour des raisons politiques.
Quoiqu’il en soit, la République fédérale créée en 1949 maintient le texte dans sa version nazie sans y apporter de grand changement. A l’est, la RDA revient en revanche à l'ancienne version un peu moins répressive, de l’avant-guerre.
A l’ouest, en revanche, la RFA se sert même des "listes roses" établies par les nazis pour engager environ 100.000 procédures contre des homosexuels, dont la moitié ont été condamnés sans appel – souvent à des peines de prison lourdes.
Avant la réunification, l’Allemagne de l'Est obtient que le droit de la République fédérale ne devienne pas le droit applicable dans toute l'Allemagne réunifiée, précisément en ce qui concerne le paragraphe 175 mais aussi l'interruption de grossesse.
Plusieurs experts estiment que sans la réunification, l'abolition du paragraphe 175 se serait fait attendre encore plus longtemps.
Pendant 123 longues années, la vie des homosexuels en Allemagne a donc été rendue infernale par la loi. Il est donc d'autant plus étonnant de voir combien de choses ont été faites entre 1994 et aujourd'hui en ce qui concerne les droits des personnes queer.
Dans ce magazine, il est aussi question du concept de "ligne rouge" en diplomatie
Pour Anne Holper, spécialiste des conflits à l'université Viadrina de Francfort-sur-l'Oder, dans l'Est de l’Allemagne, la ligne rouge est utilisée par les puissances hégémoniques pour signifier la limite à ne pas franchir pour que leur système d'ordre soit maintenu.
Droits et Libertés est une émission de Sandrine Blanchard
Avec un merci cette semaine à Thomas Latschan et Oliver Pieper