Il y a un an, la révolution en Tunisie
16 décembre 2011Le chômage, la corruption et la répression. C'est contre tout cela que se soulève la population tunisienne en cette fin d'année 2010. Après la mort de Mohamed Bouazizi, la tension est à son comble. Mais personne n'aurait pensé que moins d'un mois plus tard, le président Ben Ali quitterait la Tunisie.
"Ben Ali, dégage!"
Nous sommes le 14 janvier 2011. L'une des opposantes historiques au régime, Sihem Bensedrine, rentre au pays en provenance d'Espagne :
« En sortant de l'avion, pour la première fois depuis des dizaines d'années, je n'ai pas eu ces flics qui m'entouraient, ils venaient parfois à trente pour me harceler. Et là, d'un seul coup, j'ai eu un sentiment nouveau. Mais quand je suis sortie de l'espace de l'aéroport, juste devant le bâtiment, j'ai vu des hommes armés, en civil, qui étaient cachés dans les voitures de Tunisair et de l'aéroport. Et j'ai eu très très peur. Je me suis demandée : "Qu'est-ce qu'ils nous ont réservé ?" »
Une révolution portée par internet
Heureusement, tout se passe bien pour Sihem Bensedrine et pour la plupart des manifestants. On le sait, la révolution tunisienne a été portée par la mobilisation sur internet et par les réseaux sociaux. Nawaat.org, le site collectif tunisien, a été l'une des grandes sources d'information pendant la dictature. Malek Khadhraoui est co-fondateur de Nawaat.org. Il nuance l'importance du web :
« Je pense que c'est une erreur de dire que la révolution a été faite par ces réseaux sociaux. Les réseaux ont plutôt permis la construction mentale de la révolution. Ils étaient les seuls espaces de liberté, là où les gens pouvaient échanger leurs idées, leurs états d'âme. Et au moment où les événements de Sidi Bouzid ont éclaté, ces mêmes personnes étaient préparées à partager l'information, à la faire circuler. »
Des élections vraiment libres
Depuis lors, la Tunisie a organisé les premières élections vraiment libres du monde arabe. C'est le parti islamiste modéré Ennahda qui a remporté le scrutin. Ce n'est pas le résultat qu'aurait souhaité Yamina Mechri, blogueuse. Mais là aussi, souligne-t-elle, il faut relativiser :
« Si Ennahda maintenant est majoritaire, c'est tant mieux. C'est tant mieux parce que cela nous apprend à reconsidérer les choses autrement, à regarder la vraie société. C'est une bonne claque. C'est salvateur, parfois, d'être remis à sa place. C'est assez violent, mais on ne peut pas sortir d'un extrême sans passer par un autre extrême. »
Espérons, ajoute cependant Yamina, qu'Ennahda respectera les engagements qu'il a pris à l'issue du scrutin du 23 octobre. Et principalement celui de s'inscrire dans le processus démocratique.
Auteur : Carine Debrabandère
Edition : Aude Gensittel