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LeLa destruction du patrimoine de Tombouctou devant la CPI

Claire-Marie Kostmann1 mars 2016

Devant la CPI de La Haye se déroule pour la première fois un procès portant sur des destructions d'édifices religieux et historiques. Dans le box des accusés, un jihadiste présumé lié à Al-Quaïda, Ahmad Al Faqi Al Mahdi.

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La destruction en 2012 de quatorze mausolées de saints musulmans avait provoqué l'indignation à travers le monde
La destruction en 2012 de quatorze mausolées de saints musulmans avait provoqué l'indignation à travers le mondeImage : picture alliance/dpa

Selon l'accusation, Ahmad Al Faqi Al Mahdi s'est rendu responsable de crimes de guerre en ayant détruit neuf mausolées et une des plus importantes mosquées de Tombouctou entre le 30 juin et le 10 juillet 2012. Des bâtiments d'une grande valeur spirituelle pour les soufis - mais considérés comme de l'idôlatrie pour les jihadistes. Qui savaient très bien ce qu'ils faisaient en s'y attaquant, rappelle Christoph Brumann. Il est à la tête d'un groupe de recherche ethnologique de l'Institut Max-Planck à Halle:

"Étant donné l'attention croissante accordée au patrimoine culturel ces dernières décennies, cela fait de lui une cible. D'une part pour démoraliser l'adversaire - en détruisant quelque chose qui est important pour lui - et d'autre part pour faire les gros titres. Cela avait déjà été le cas en Afghanistan avec la destruction des Bouddhas de Bamiyan par les Talibans, et ça l'est également à Tombouctou. Et c'est le même phénomène avec l'Etat islamique qui détruit Palmyre, Hatra et d'autres cités, pour envoyer ce message."

Déjà des destructions en Yougoslavie

Le phénomène n'est pas nouveau. Lors de la guerre de Yougoslavie, au début des années 1990, la ville historique de Dubrovnik et celle de Mostar avaient été prises pour cible par l'artillerie serbe. En 2013, six personnes ont été condamnées par le Tribunal international pour l'ex-Yougoslavie pour la destruction du pont de Mostar, vieux de 450 ans. Mais ces faits étaient assez marginaux dans le dossier qui comptait aussi des viols et des expulsions. Reste que pour les habitants de Tombouctou, victimes de violences physiques et morales, ce premier procès à La Haye serait un début de reconnaissance d'après Karl Flittner, ancien ambassadeur d'Allemagne au Mali:

Le pont de Mostar en Bosnie avait été détruit lors de la guerre de Yougoslavie
Le pont de Mostar en Bosnie avait été détruit lors de la guerre de YougoslavieImage : DW/V. Soldo

"La conscience de vivre dans une ville qui a un grand passé - dont il n'est pas resté grand-chose - mais aussi les souvenirs de cette science, de cette sorte d'université, qui remontent à loin, sont très importants pour la confiance en soi des habitants de Tombouctou. Par conséquent, cette destruction est évidemment un acte contre la population."

Début février, plusieurs mausolées restaurés avec l'aide de l'Allemagne ont été inaugurés.