La ville de Chemnitz toujours sous tension
30 août 2018Des cars de policiers saxons, d'autres venus en renfort d'autres régions, des dizaines de journalistes ... Il y a encore de l'agitation dans la ville de Chemnitz à l'est de l'Allemagne ce jeudi. Alors que le ministre-président de la région Michael Kretschmer est en visite dans cette ville où ont eu lieu de graves manifestations racistes après le meurtre d'un Allemand la semaine dernière, l'extrême droite appelait de nouveau à descendre dans la rue. Comme lundi soir, où près de 5.000 personnes ont crié leur haine des étrangers.
Ce jeudi entre 1000 et 2000 personnes participent au rassemblement selon le quotidien local Freie Presse sur place. Elle se tient, beaucoup plus calmement que lundi, devant un stade, dans lequel le ministre-président tient une réunion de dialogue avec les habitants. La discussion avait été prévue avant les événements récents, mais il est évidemment beaucoup question des manifestations et du meurtre du week-end dernier.
Avant cela ce jeudi, la classe politique régionale a beaucoup réagi et tenté d'aller de l'avant. Des élus a qui on avait parfois reproché de ne pas montrer assez leur désapprobation des manifestations de lundi.
"L'Etat a le monopole de l'usage de la force"
Après les condamnations d'Angela Merkel, du gouvernement ou même de l'ONU mercredi, le ministre-président de la région Michael Kretschmer n'avait pas le choix, et, en marge de sa visite, s'est montré ferme. "Cela est très important pour moi : l'Etat a le monopole de l'usage de la force. Nous appliquerons la loi et l'ordre", a-t-il insisté. Et d'assurer que les responsables du meurtre du week-end, élément déclencheur des manifestations, seraient condamnés, tout comme "ceux qui ont traversé la ville en faisant des saluts hitlériens."
Appliquer la loi, mais aussi aller de l'avant et voir comment éradiquer cette haine. C'est ce que veut maintenant faire la maire de la ville de Chemnitz Barbara Ludwig, en visite dans une école ce jeudi matin. "Il faut gérer la situation mais aussi développer des idées sur ce qu'on doit faire dans une telle situation pour maintenir le vivre ensemble parmi les citoyens, pour qu'il ne se sentent pas inquiets", explique-t-elle.
Un problème profond et ancien
Mais les manifestations qui ont depuis plusieurs jours montrent que le problème du racisme est très ancré dans la région. Les élus et même la police, qui semblait encore débordée lundi soir, sont montrés du doigt. "La situation est telle qu'il a été possible en Saxe depuis longtemps pour des acteurs néo-nazis d'agir en grande partie sans être inquiétés. Et donc il était possible pour eux de normaliser leurs idées, parmi lesquelles il y a le racisme", assure Steven Seifert, membre d'une organisation pour la démocratie et contre l'extrême droite, à Dresde, non loin de Chemnitz. "À partir du moment où c'est considéré comme normal, toute opposition est perçue comme anormale, toute objection est perçue comme une attaque contre sa propre identité. C'est cela qui fait que la situation peut rapidement conduire à l'escalade".
Manifestation de la société civile
Pour éviter cette situation, pour donner une autre image de leur région aussi, de nombreux citoyens se mobilisent contre l'extrême droite à Chemnitz. Le hashtag "Wir sind mehr", nous sommes plus nombreux, a été lancé sur Internet ces derniers jours. Un grand concert contre le racisme devrait réunir plusieurs milliers de personnes lundi soir, là même où les extrémistes se sont réunis en début de semaine. Et comme un symbole ce jeudi, de nouveaux Stolpersteine, comme on trouve dans toute l'Allemagne, ont aussi été installés dans les rues de Chemnitz. Dix-neuf pavés en métal, avec une plaque, installés dans le sol, et gravés avec les noms de victimes du nazisme.
Enfin, il faut noter dans cette affaire que le mandat de dépôt d'un Irakien de 22 ans arrêté après le meurtre du week-end dernier avait été publié sur internet mercredi, avec ses antécédents judicaires et des informations personnelles. Une publication illégale, qui s'est rapidement propagée sur Internet. Un agent pénitencier de la ville de Dresde a été suspendu ce jeudi, soupçonné d'être à l'origine de la fuite.