L’Afrique, plaque tournante du trafic mondial de drogue ?
4 juin 2021Le phénomène n’est pas nouveau, il date, notamment pour ce qui concerne la cocaïne, de la seconde moitié des années 2000. Mais les derniers chiffres sont inquiétants. Nous poursuivons notre enquête sur le trafic de drogues en Afrique avec un focus sur les routes de ce trafic. Selon toute vraisemblance, 2019 devrait être une année record de saisies de cocaïne en Afrique et marquer le retour du continent dans le grand jeu des trafiquants qui utilisent depuis une quinzaine d’années cette zone de transit pour s’ouvrir les portes de l’Europe.
Les premières estimations de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) indiquent que les récentes saisies de cocaïne en Afrique, notamment au Sénégal, au Bénin et en Guinée Bissau, suggèrent que celles-ci pourraient atteindre une vingtaine de tonnes, soit près de quatre fois plus que l’année précédente.
Et à elle seule, l’Afrique de l’Ouest compte pour 80% du montant total des saisies.
Mais pour comprendre cette situation, il faut remonter à 2005. À cette époque, les trafiquants sud-américains de cocaïne commencent à comprendre que leur business a changé et que l’Afrique est la solution à leur problème.
La saturation du marché américain, l’indépendance accrue des cartels mexicains et la fermeture de la route des Caraïbes les conduisent à rediriger leur production vers le marché européen en utilisant l’Afrique comme une étape intermédiaire.
Les Nations unies estiment qu’environ 50 tonnes de cocaïne destinées au marché européen transitent chaque année par le golfe de Guinée.
Le phénomène est d’ailleurs assez similaire avec l’héroïne. Les trafiquants qui transportent la production provenant essentiellement d’Afghanistan s’efforcent d’éviter désormais la route des Balkans, très surveillée, en faisant un détour maritime par l’Afrique de l’Est.
Mais si la cocaïne et l’héroïne sont des drogues de transit, la situation est différente avec le cannabis puisque celui-ci est largement cultivé en Afrique et transporté vers l’Europe, notamment par des réseaux nigérians.
Enfin, il y a le tramadol. Cet antalgique a vu son usage non médical se diffuser dans toute l’Afrique de l’Ouest. Les saisies sont passés de huit tonnes en 2013 à 125 tonnes en 2017, représentant près de 90% des saisies mondiales de tramadol.
Toutefois, pour cette drogue, les saisies enregistrées en 2018 avaient marqué un net recul, sans doute imputable à une rupture des approvisionnements depuis l’Inde où le tramadol est produit.