Le coronavirus aggrave la faim dans le monde
12 octobre 2020Eradiquer la famine d’ici 2030. Les Nations unies se sont fixé cet objectif il y a cinq ans. Des progrès ont été enregistrés dans les années 2000 pour faire reculer la faim dans le monde mais la pandémie de Covid-19 est venue remettre en cause les progrès accomplis ces dernières années. C’est ce qui ressort de l’Indice de la faim dans le monde, publié ce lundi (12.10.2020) en Allemagne.
Près de 690 millions de personnes souffrent de sous-alimentation dans le monde. 144 millions d’enfants ont de ce fait des problèmes de croissance et, en 2018, 5,3 millions d’enfants sont morts avant leur cinquième anniversaire.
Voici comment résumer en quelques chiffres le constat dressé par l’ONG allemande Welthungerhilfe.
C’est elle qui publie le classement annuel des pays touchés par la faim ou des risques de famine. Elle attribue aux pays une sorte de note : 0 signifie que les habitants d’un pays ne souffrent pas du tout de la faim, 100 est la note la plus mauvaise.
Pour définir la note, quatre critères ont été retenus :
- La sous-alimentation (la proportion de personnes dont l’apport quotidien en calories est insuffisant pour répondre aux besoins de leur organisme, en bleu clair sur l'infographie ci-dessous).
- Les retards de croissance chez les enfants (les enfants de moins de cinq ans qui ont une taille insuffisante par rapport à leur âge, signe de sous-alimentation chronique, en bleu soutenu sur l'infographie ci-dessous).
- Le taux d’amaigrissement chez des enfants (les enfants de moins de cinq ans qui ont un poids trop faible par rapport à leur taille, signe de sous-alimentation grave, en bleu très foncé sur l'infographie ci-dessous).
- La mortalité infantile (taux de mortalité chez les enfants de moins de cinq ans, en gris sur l'infographie ci-dessous).
Des progrès notables dans certains pays d'Afrique
En 2020, la note globale est de 18,2 (contre 28,2 en 2000) mais les disparités restent énormes d’une région du monde à l’autre.
La note de l’Afrique subsaharienne est de 27,8. Certains pays comme le Cameroun, l’Angola, l’Ethiopie ou la Sierra Leone ont fait toutefois de gros progrès ces vingt dernières années, soit parce qu'ils ont mis fin à la guerre civile, soit (et l'un n'empêche pas l'autre) parce qu'ils ont investi massivement dans les systèmes de santé.
"Un échec moral"
En plus des crises et conflits, Simone Pott, la porte-parole de Welthungerhilfe, cite la pauvreté, les inégalités sociales, le manque d’accès aux soins et le changement climatique comme facteurs aggravants des risques de famine.
Pour elle, il s’agit du "plus gros échec moral et éthique de notre génération".
En plus de cela, le nombre de personnes touchées par la faim dans le monde risque de doubler à cause du coronavirus.
"Les mesures de confinement ont eu des répercussions fatales pour les millions de personnes qui travaillent dans le secteur informel […] et de nombreux paysans et paysannes n’ont pas pu cultiver cette année leurs champs", souligne Simone Pott.
La pandémie a affaibli l’économie de tous les pays et fait diminuer les revenus de nombreux foyers, y compris en Europe.
Appels à la solidarité des Allemand(e)s
Le ministre allemand de la Coopération, Gerd Müller, réclame "des aides de plusieurs milliards supplémentaires" et des "réformes agraires radicales". Selon lui, "la faim reste le plus grand des scandales évitables. La planète a assez de ressources pour nourrir dix milliards d’humains."
Un appel qui rejoint celui du président de l'Allemagne, Frank-Walter Steinmeier qui en appelle à la solidarité de ses concitoyens avec "les pays du Sud", encore davantage en période de pandémie.
L’Allemagne investit deux milliards d’euros par an en faveur de la sécurité alimentaire et du développement agricole – notamment pour la réhabilitation des sols ou l’emploi des jeunes dans ce secteur.
Encore une preuve de l'importance de la lutte contre la faim dans le monde, la semaine dernière, le prix Nobel de la paix a couronné l’action du Programme alimentaire mondial. Ce programme onusien a assisté 97 millions de personnes dans 88 pays différents l’année dernière, d’après ses propres statistiques.