Le Nigeria remonté contre la xénophobie en Afrique du Sud
5 septembre 2019Les violences xénophobes qui ont fait au moins dix morts (selon un nouveau bilan) en Afrique du Sud continuent de susciter des réactions diplomatiques et des actes de représailles dans plusieurs pays africains : la Zambie, le Kenya, la Tanzanie, la RDC et surtout le Nigeria. Le gouvernement nigérian a rappelé son ambassadeur Kabiru Bala en poste en Afrique du Sud et des vols gratuits sont proposés aux ressortissants nigérians désireux de rentrer. Pourtant les semaines qui viennent promettaient un rapprochement diplomatique.
Buhari attendu à Pretoria
En effet, un voyage du président nigérian Muhammadu Buhari est prévu au mois d'octobre en Afrique du Sud. Information annoncée en août par Garba Shehu, porte-parole de la présidence nigériane.
À l'invitation de Pretoria, Muhammadu Buhari devrait échanger avec son homologue Sud-Africain Cyril Ramaphosa sur divers sujets, dont la sécurité des Nigérians en Afrique du Sud. Depuis 2016, les attaques xénophobes auraient fait des centaines de morts au sein de la communauté nigériane. Pourtant ces derniers jours, les Nigérians n'apparaissaient pas plus visés que les autres immigrés. Mais l'occasion semble propice au Nigeria pour exprimer son ras-le-bol.
Selon Philip Afaha, professeur d'université à Abuja, "nous avons libéré notre continent de sorte à pouvoir nous déplacer et échanger entre nous. C'est pourquoi il faut que l'organe paix et sécurité de l'Union africaine se réunisse d'urgence pour trouver une solution à cette situation. L'année prochaine, le président de l'Afrique du Sud deviendra président de l'Union africaine. Alors il n'est pas possible que ce pays aille dans la direction que nous constatons actuellement."
Pour Koffi Kouakou, politologue et Maître de conférences à l'université de Witwatersrand de Johannesbourg, "Abuja veut lancer un message très ferme" à l'Afrique du Sud, même si les Nigérians vivant dans ce pays sont impliqués dans des "questions de drogue".
Par crainte de représailles, l'Afrique du Sud aussi a fermé son ambassade à Lagos. Plusieurs magasins sud-africains ont enregistré des attaques et des artistes nigérians sont montés au créneau pour dénoncer les violences en Afrique du Sud.
Le calme après la tempête
Malgré leurs rivalités, les deux pays ont tout de même réussi à doubler leurs échanges commerciaux qui représentent 4,5 milliards de dollars d'après l'agence ecofin. Ce jeudi (05.09.) un conseiller à la présidence du Nigeria a assuré à des journalistes que son pays s'engageait à coopérer avec l'Afrique du Sud.
Nicholas Kotch, chroniqueur économique et consultant qui a séjourné dix ans en Afrique du Sud, pense que la crise actuelle ne va pas influencer les relations économiques. "Il n'y aura pas d'impact important pour l'instant du moins", affirme le spécialiste dans une interview à la Deutsche Welle.
D'ailleurs dit-il, "la ministre des Affaires étrangères au Nigeria a confirmé qu'il n'y avait pas eu d'agressions physiques contre les membres de la représentation diplomatique (sudafricaine, ndlr). Les deux géants économiques, militaires aussi mais surtout économiques de l'Afrique ont des relations très importantes mais souvent il y a des différends entre les deux. Je pense que ça s'arrêtera là."
Des arrestations
Les autorités sud-africaines ont annoncé l'arrestation de plus de trois cents personnes après les agressions qui ont visé des étrangers notamment à Pretoria et Johannesbourg.
Par ailleurs, le consulat d'Afrique du Sud et un magasin sud-africain ont été attaqués à Lubumbashi, deuxième ville de la République démocratique du Congo. Le Botswana et la RDC ont appelé leurs ressortissants à la prudence.