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L'entente entre l'armée malienne et l'Africa Corps s'effrite

22 octobre 2024

Avec la défaite de Tinzaouatène, les relations entre l’armée malienne et les mercenaires russes de l’Africa Corps, ex-Wagner, semblent se détériorer.

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Des soldats de l'armée malienne au garde à vous
L'armée malienne est composé d'au moins 34 000 hommesImage : picture-alliance/dpa/M. Kapeler

Fin juillet, l’armée malienne et ses alliés russes ont subi une lourde défaite à Tinzaouatène, proche de la frontière avec l’Algérie, face aux rebelles touaregs du Cadre stratégique permanent pour la défense du peuple de l’Azawad (CSP-DPA). Plusieurs dizaines de soldats maliens et russes auraient été tués, selon des bilans qui varient selon les sources. Une opération de représailles aurait dû être conduite à Tinzaouatène, mais celle-ci n'a jamais eu lieu. L’absence de contre-offensive s’expliquerait par la mésentente croissante entre les deux alliés.

Des rebelles touaregs de la CMA à Kidal en août 2022
Les rebelles touaregs de la Coordination des mouvements de l'Azawad font partie du Cadre stratégique permanent pour la défense du peuple de l’Azawad (CSP-DPA)Image : SOULEYMANE AG ANARA/AFP/Getty Images

L'opération  "Vengeance" n’a toujours pas été lancée. Pourtant, celle-ci était voulue par les forces armées maliennes et elle avait été relayée sur  les réseaux sociaux, y compris par les autorités militaires au pouvoir au Mali.   

Plusieurs sources sécuritaires ont confié que les mercenaires russes de l'Africa Corps auraient notamment mis en cause le manque de professionnalisme et de stratégie cohérente de l’armée malienne.  

Selon les informations du magazine Jeune Afrique, les Russes reprocheraient aussi aux militaires maliens leur manque de discrétion, avec notamment la publication de leur localisation sur les réseaux sociaux, au cours de leur déplacement vers le nord du pays.  

Problèmes internes à l'armée malienne

Ahmedou Ould Abdallah, l’ancien ministre mauritanien des Affaires étrangères et président à Nouakchott du Centre des stratégies pour la sécurité du Sahel au Sahara (C4S), rappelle toutefois que ces tensions ne sont pas nouvelles. 

Le général Assimi Goïta, le chef de la junte militaire au Mali
Assimi Goïta, le chef de la junte militaire, compte sur la diversification des partenariats de son pays pour espérer vaincre le djihadismeImage : OUSMANE MAKAVELI/AFP/Getty Images

 "C'est très possible. Surtout après ce qui s'est passé à Tinzaouatène, dans le nord du Mali. Mais l'armée malienne ne s'entendait pas non plus avec l'armée française. Et elle a des problèmes internes entre plusieurs soldats de plusieurs régions", dit-il. 

La défaite de l'armée malienne et de leurs alliés russes à Tinzaouatène semble avoir exposé au grand jour les dissensions entre les deux alliés, soutient aussi Mohamed Amara, enseignant à l’université des lettres et des sciences humaines de Bamako. 

 Il explique que "Tinazaouatène reste encore l'alpha et l'oméga d'une situation de tension entre les différents alliés : on peut citer les Maliens et les Russes, du moment où Tinzaouatène a été une défaite des forces armées maliennes avec leurs alliés russes. Et cette défaite aurait été, j'utilise le conditionnel, le point de départ des supposées difficultés de compréhension entre les deux groupes au point qu'aujourd'hui, cela rend difficile  les possibilités de collaboration". 

 Mais ces tensions ne datent pas de la défaite de Tinzaouatène. En novembre 2023, une semaine après la prise de la ville de Kidal, dans le nord du Mali, des mercenaires russes avaient hissé le drapeau noir de Wagner au sommet du fort de la ville.  

 Ils souhaitaient manifester ainsi leur mécontentement, car le chef de la junte, le désormais général Assimi Goïta, avait mis en avant l’action de l’armée malienne, semblant oublier l’apport décisif de Wagner dans cette victoire.  

 Contactés, plusieurs officiels maliens n'ont pas  répondu à nos demandes d'interview sur le sujet, qu'elles jugent très sensible et classé secret défense. 

Diversification de partenariat 

Ankara s’est déclaré prêt à aider les autorités maliennes à lutter contre le terrorisme. Au début de cette année, le chef de la transition militaire, Assimi Goïta, a réceptionné à Bamako une vingtaine de drones de type Bayraktar TB2 de fabrication turque. 

Enfin, la société de défense paramilitaire turque Sadat (créée en 2012 par Adnan Tanriverdi, ancien conseiller en chef du président turc Recep Tayyip Erdogan entre 2016 et 2020 et décédé en août 2024, ndlr) aurait formé récemment plusieurs soldats maliens chargés de la protection du chef de la junte malienne. 

Les autorités maliennes de la transition réceptionnant des hélicoptères livrés par la Russie
Les autorités maliennes de la transition réceptionnant des hélicoptères livrés par la Russie en septembre 2021Image : Malische Armee

Sadat possède notamment plusieurs bataillons de combattants syriens. Peut-on s'attendre au déploiement de ces mercenaires au Mali ? Ahmedou Ould Abdallah explique que "les combattants qu'utilisent les Turcs de Sadat ont fait leurs preuves en Libye, même s'ils n'étaient pas en grand nombre. Ils seraient également présents pour certaines protections de sites nucléaires au Niger. Mais je ne les vois pas s'opposer aux combattants de Wagner. Ce sera plutôt un travail complémentaire".  

On estime entre 1.500 et 2.000 le nombre de combattants du groupe paramilitaire russe Africa corps déployés au Mali.  Des informations jamais confirmées par les militaires au pouvoir à Bamako.

DW MA-Bild Eric Topona
Eric Topona Journaliste au programme francophone de la Deutsche WelleETopona