Les blogueurs et la Révolution tunisienne
24 mai 2011Après 23 ans de filatures, de pressions et de menaces en tout genre sous la dictature de Ben Ali, les Tunisiens peuvent enfin exprimer leurs opinions. Si la presse traditionnelle était totalement muselée sous l'Ancien régime, les réseaux sociaux tels que Facebook et Twitter, les plate-formes internet telles que Nawaat.org et les radios en ligne à l'instar de Radio Kalima ont joué un rôle essentiel dans la révolution tunisienne. Sihem Bensédrine est rédactrice en chef de Radio Kalima :
« Les réseaux sociaux ont joué un rôle décisif, parce qu'ils ont partagé en temps réel certaines images, certaines informations qui donnaient corps à cette révolution et qui la liait aux autres, qui en faisait un puzzle complet. »
Internet, une arme à double tranchant
Dans un rapport publié à la mi-mai, Amnesty International souligne également le rôle de « rassembleur » des réseaux sociaux. Mais l'organisation de défense des droits de l'Homme met en garde les internautes : les dictateurs peuvent également se servir des nouvelles technologies de la communication contre les militants.
Malek Khadhraoui est rédacteur en chef de Nawaat.org. Il salue bien sûr la levée officielle de la censure en Tunisie, qui s'est produite le 13 janvier au soir. Malek Khadhraoui invite quand même à la prudence :
« Les structures de la censure existent toujours. Les serveurs qui gèrent le nœud internet sont toujours gérés par l'Etat tunisien. Il est centralisé, donc l'accès à ces serveurs est toujours possible par d'autres appareils de l'Etat. On n'a pas d'ailleurs ouvert d'enquête sur toutes ces années de censure, de piratage, et de collecte d'informations personnelles. Pour me connecter à Nawaat, pour entrer dans la plate-forme de gestion, j'utilise toujours un proxy pour me protéger, le cas échéant, de personnes qui essaieraient peut-être de pirater le site. »
Les proxy sont des serveurs qui permettent de contourner la censure. Depuis le 14 janvier, Nawaat.org est devenu une plate-forme internet qui se veut être un lieu de débats, un lieu d'échanges d'idées. Le site a donc ouvert ses portes aux contributions extérieures :
« Le nouveau rôle de Nawaat, c'est de devenir une plate-forme qui centralise, qui mutualise les opinions, l'opinion publique qui est le nouvel acteur aujourd'hui en Tunisie. Nawaat se propose d'être la caisse de résonnance de cette opinion publique, dans toute sa diversité. »
Les internautes ont perdu l'un des leurs au sein du gouvernement provisoire tunisien : Slim Amamou, qui avait joué un grand rôle avec son blog pendant la révolution et qui avait été nommé secrétaire d'Etat à la jeunesse et aux sports a annoncé sa démission.
Auteur : Carine Debrabandère
Edition : Fréjus Quenum