Les motos-taxis interdits à Lagos, les usagers pas contents
3 février 2020Les autorités de Lagos ont mis à exécution la première phase de leur décision d’interdire la circulation des motos-taxis et des tricycles dans six communes suite aux nombres élevés d’ accident de la circulation.
Malgré son accident, Chinasa Agu, inconditionnelle du transport à moto est contre cette interdiction. "J'habite à Alakija, j'emprunte la moto quand l'embouteillage est monstre. J'ai une mauvaise expérience à partager : un jour, de retour chez moi, j'ai fait un accident avec la moto. J'étais au sol, le tuyau d’échappement était sur mon pied, le conducteur de la moto criait "Pourquoi Dieu, pourquoi Dieu ?". Mais cela ne m'empêche pas de remonter sur une moto. Hier encore, j'ai emprunté une moto-taxi. Interdire les motos taxis n'est pas la meilleure des solutions", dit la jeune dame.
Pour une mégapole de 23 millions d’habitants où le système de transport est défaillant, la décision des autorités de Lagos n'est pas appréciée de l'ensemble des conducteurs, structuré ou non, certains disposant même d'une application internet pour exercer leur profession. "On ne pourra plus s'occuper de nos familles si ce métier est interdit, s'il n'y a plus de motos-taxis. Allons nous organiser des cambriolages et des vols à main armée pour subsister ?", s'indigne ce conducteur.
Autre indignation, celle de ce conducteur qui affirme : "Les motos taxis ne dérangent pas l'Etat de Lagos. Elles contribuent à soulager la population des embouteillages. Nous sommes une compagnie de transport de motos qui travaille comme Uber, et nous respectons le code de la route. Mettre fin à notre service de motos type Uber ne va aider personne, parce que les embouteillages sont nombreux et la route n'est pas bonne."
Au nom de la sécurité
Pour Joe Obukwe, membre du conseil d'administration de la commune d'Etiosa, une des 6 communes affectées par l'interdiction, la décision des autorités de Lagos est compréhensive: "Je voudrais vous rappeler que vous ne verrez pas les motos-taxis dans des villes comme Abuja, Delta, Kano ou encore Oweri, puisque ces villes ont interdit l'usage des motos taxis. En conséquence, tout le monde vient ici, à Lagos, parce qu'il y a moyen de se faire de l'argent. C'est pour le business. Pire encore : il est possible de braquer une banque à moto et partir librement sans être inquiété. Je ne parle même pas des personnes qui sont mortes du fait des accidents. Sinon, j'ai travaillé à Apapa pendant quatre ans, j'ai vu des gamins qui devraient être à l'école, mais qui faisaient le transport à moto. Ces enfants n'avaient pas de maison, ils dormaient sur les motos, et dès 5 heures du matin, ils se mettaient au travail. Donc si nous voulons créer une cité modèle, il y a un prix à payer."
Pour l'heure, les habitants de Lagos s’adaptent petit à petit au changement de leur mode de transport, en attendant la promesse des autorités sur des mesures d'accompagnement avec notamment la mise en circulation des bus pour remplacer les motos et autres tricycles.