Les 28 ont besoin d'Ankara
7 mars 2016De nombreux journaux reviennent sur la prise de contrôle vendredi dernier par les autorités turques du journal Zaman, principal quotidien du pays et jusque-là critique vis à vis du pouvoir du président Recep Tayyip Erdogan.
"Le gouvernement turc place le quotidien Zaman sous le contrôle de l'Etat! Un tel acte dictatorial n'a rien à voir avec la démocratie, ni avec les Droits de l'Homme" s'indigne la Frankfurter Rundschau. Mais au lieu de protester haut et fort, les responsables européens ne font que lever l'index. Et le ministre allemand de l'Intérieur, Thomas de Maizière déclare que l'on ne doit pas jouer l'arbitre pour les Droits de l'Homme partout dans le monde... On en reste presque coi ! La raison pour cette retenue, critique le quotidien de Francfort: c'est que pour régler la crise des réfugiés, l'Union européenne a besoin de la Turquie. Et comme les pays de l'Union ne sont pas disposés à accueillir les migrants et réfugiés, l'Empire d'Erdogan est prié de le faire à leur place!
"L'Union européenne souhaite que la Turquie soit la gardienne de sa frontière extérieure en Mer Egée et veut la payer pour qu'elle reprenne aussi sur son sol les demandeurs d'asile déboutés ", relève le quotidien Landeszeitung de Lunebourg. "Il n'est donc pas étonnant que l'indignation soit restée discrète lorsque le journal Zaman a été placé sous le contrôle total d'Ankara", en conclut l'éditorialiste qui avertit cependant: "l'Union européenne ne doit pas se faire d'illusions, car se prosterner devant Erdogan ne remplace pas une véritable politique d'immigration !"
"'La route des Balkans est fermée!" C'est avec ce court message que les dirigeants de l'Union européenne veulent amorcer un virage serré lors de ce sommet UE- Turquie à Bruxelles, relève la taz qui souligne : "Ce serait là un virage à 180%, surtout pour la chancelière Angela Merkel !"
"Il ne peut s'agir de fermer quoi que ce soit!"
C'est ce qu'a souligné Angela Merkel en arrivant à Bruxelles. Cependant, de nombreuses voix se font entendre - en Allemagne comme en Europe - qui voient venir la fin de l'ère Merkel et qui spéculent déjà sur sa succession…
"C'est bien trop tôt pour cela! , relève la Süddeutsche Zeitung. Angela Merkel n'a pas encore perdu. Et si la chancelière devait vraiment perdre, alors l'Europe serait aussi perdue. Certes: déjà avant la crise migratoire, la chancelière avait commis des erreurs dans ses rapports avec les pays du sud de l'Union européenne, elle les a parfois humiliés; ce sont des erreurs qui se vengent maintenant. Malgré cela la ligne d'Angela Merkel était et reste juste: L'Europe doit agir ensemble et toujours respecter les Droits de l'Homme. Une Union européenne qui n'agit pas de manière commune dans la crise des réfugiés ne pourra bientôt plus agir du tout. Une Europe, qui hérisse ses parcelles nationales de fils de fer barbelés, comme l'ont fait d'abord la Hongrie, puis l'Autriche, cette Europe se démonte elle-même", craint la Süddeutsche.