Malala et la théorie du complot
11 octobre 2013Il est 18 heures quand la nouvelle tombe au Pakistan en ce mardi 9 octobre 2012 : les talibans ont tiré sur Malala Yousufzai. Cette écolière les critiquait sur son blog. La jeune fille a pris une balle dans la tête. Dans les jours qui suivent, le pays dénonce la lâcheté de ses agresseurs.
Un an plus tard pourtant, Malala ne suscite plus l'empathie mais la méfiance dans son pays. Certains de ses concitoyens la soupçonnent d'être un agent de la CIA. Finie aussi la vague de colère contre les talibans. Le gouvernement essaie désormais de négocier avec eux pour mettre fin aux attentats. Pour Ayaz Amir, homme politique et éditorialiste, le parti au pouvoir se laisse intimider pour des raisons électorales:
« La ligue musulmane du Pakistan, qui est majoritaire au Parlement, a peur que les talibans commettent des attentats dans la province du Penjab. Cette région est son fief électoral. C'est aussi le bastion de plusieurs groupes islamiques armés qui sont proches des talibans. Donc les autorités préfèrent apaiser les insurgés plutôt que de les affronter. »
Un système judiciaire inadapté
Alors que les talibans ont perpétré 900 attentats qui ont fait un millier de morts l'an dernier, aucun chef du mouvement n'a été traduit en justice. Shahzad Akbar est avocat à Islamabad. Pour lui, le système judiciaire est incapable de traiter les affaires de terrorisme:
« Il y a deux problèmes. D'abord, il n'y aucun système de protection des témoins et des magistrats. Ensuite, la loi en vigueur date du 19ème siècle. Elle est tellement ancienne que les écoutes téléphoniques et les images des caméras de surveillance ne sont pas reconnues comme des preuves par les tribunaux. »
Ce climat d'impunité est propice aux théories conspirationnistes. Les islamistes pensent que la tentative de meurtre contre Malala est un coup monté des Américains pour ternir l'image du Pakistan. Quant aux talibans, ils ont encore menacé de tuer l'adolescente lundi dernier.