Mali : faut-il dialoguer avec les djihadistes ?
29 mai 2019C'est une vieille polémique qui refait surface avec un rapport. Celui publié ce mardi 28 mai par l'International Crisis Group. Le groupe d'analyse recommande d'établir un dialogue avec les djihadistes au Mali pour mettre fin aux violences dans le centre du pays. Sont ainsi concernés par cette demande de dialogue : le prédicateur peul Amadou Koufa, dont le groupe opère dans le centre du Mali, et le chef djihadiste touareg Iyad Ag Ghaly.
L'ICG préconise cette démarche parallèlement aux efforts militaires pour imposer la paix. Une telle idée avait été proposée il y a deux ans lors d'une conférence nationale mais elle a été rejetée par le gouvernement.
Désarmer par la force ...
Pour Alou Campo, chef de la mission de réconciliation entre Dogons et Peuls, la recommandation du groupe ICG est marquée par des insuffisances. "Le Mali a opté pour la laïcité et je crois que le dialogue avec ceux qui veulent imposer la charia n'est pas compatible", estime-t-il. "Il faut que l'Etat s'impose, il faut désarmer ces groupes armés", insiste-t-il.
.... Ou négocier
Mais au contraire, cette idée de dialogue est la bonne et la seule valable, réagissent d'autres. "Ce n'est pas avec les militaires qu'on peut ramener la paix sur le long terme", estime Ousmane Sy, ancien ministre de la décentralisation et directeur du Centre d'études et de réflexion au Mali (CERM).
Il est originaire du centre du pays, où se concentrent les problèmes. "L'islam est présent dans cette zone depuis des siècles, alors face aux évolutions actuelles, il faut faire discuter les adeptes d'un islam rigoriste avec les modérés, les autorités locales et nationales", conseille Ousmane Sy.
Des précédents
En 2017, le chef de l'Etat s'était montré ouvert à l'idée d'un dialogue, avant de changer de position après la visite de ministres français en allemand. "La communauté internationale veut des solutions rapides, et on peut comprendre car elle a investi beaucoup d'argent sur place, mais seul le dialogue peut aider sur le long terme", insiste Ousmane Sy. Une vision que le gouvernement malien ne semble pour l'heure pas partager. En attendant les violences se poursuivent. Le 23 mars quelque 160 villageois peuls étaient tués par des membres présumés de groupes de chasseurs dogons, à Ogossagou, près de la frontière burkinabè.