"Nous proposons une Guinée fédérée" (Thierno Alex Diallo)
DW : Bonjour Mr. Thierno Alex Diallo
Thierno Alex Diallo : Bonjour Mr. Barry
Vous vivez à Copenhague au Danemark depuis 1984. Vous êtes issu d’une famille politique dont certains membres sont assez célèbres en Guinée, votre pays d’origine.
Thierno Alex Diallo : Effectivement, je suis né à Labé, il y a 52 ans. J’ai quitté la Guinée alors que je n’avais que 5 ans pour retrouver mes parents en Côte d’Ivoire. J’ai fait mes études primaires à Abidjan avant d’être sélectionné pour le prestigieux Lycée Scientifique de Yamoussoukro en 1981. À 14 ans, mon amour pour la mer, ma fascination pour les navires et ma curiosité de découverte m’embarquent dans un voyage incroyable. Ainsi, je me suis caché à bord d’un navire danois pour gagner le Danemark. Ensuite, j’ai été adopté par de nombreuses familles danoises y compris l’armateur du navire qui m’a transporté au Danemark.
J’ai été formé à l'école des officiers de navigation en 1994 puis j’ai poursuivi des études dans le domaine des transports et de la logistique. Ensuite, j’ai travaillé pour plusieurs compagnies maritimes danoises comme Maersk Line, des organisations internationales telles que la Division des approvisionnements de l'Unicef et la Croix-Rouge danoise. J’ai enseigné la stratégie et l'organisation de la logistique à Copenhagen Business College. Enfin, je suis titulaire d’un Executive MBA en économie maritime et logistique en 2007.
DW : Et avec cette expertise, votre rêve est d’équiper votre pays, la Guinée, de sa propre flotte de vraquiers pouvant transporter une partie de ses propres minerais d'exportations.
Thierno Alex Diallo : Oui, j’aimerais bien exécuter cette vision avec des amis danois et guinéens. Nous avons créé une entreprise spécialisée à cet effet, en utilisant mon solide réseau dans le monde du transport maritime international. Je précise que le navire "l’île de Los " à Conakry a été acheminé en Guinée par nos soins. Malheureusement, nous avons dû abandonner en raison de divergences avec certains membres de l'ancien régime alors que nous étions sur le point de fournir à la Guinée ses propres navires pour transporter sa bauxite conformément au code minier guinéen. Malheureusement, nous avons été stoppés à mi-chemin.
DW : Et maintenant, vous avez en projet de lancer votre Parti politique « L’alternative ».
Est-ce la conséquence directe de votre frustration vis-à-vis des politiques ?
Thierno Alex Diallo : Pour être honnête, je n'ai jamais voulu faire de la politique. Mais voyant la souffrance du peuple de Guinée, je ne pouvais pas non plus ne pas agir. Ma priorité n’est ni la présidence ni l’obtention des postes ministériels, mais plutôt de partager une vision d’avenir avec les Guinéens.
DW : Pourquoi la dénomination « L'alternative » ?
Thierno Alex Diallo : Nous avons choisi ce nom parce que nous voulons offrir quelque chose de nouveau, quelque chose de différent. Nous voulons marquer une rupture nette avec le passé et essayer une direction radicale basée sur le fameux modèle scandinave. Ce ne sera pas facile mais ce n'est pas impossible non plus car nous n'avons pas besoin de réinventer la roue.
DW : Qu'est ce qui fera la différence entre votre Parti « L’alternative » et les autres partis politiques en Guinée ?
Thierno Alex Diallo : L’Alternative est un parti Fédéraliste Radical Libéral qui croit en une République Fédérale de Guinée avec une constitution basée sur des principes fédéraux.
Nous proposons de mettre en œuvre le modèle danois de libéralisme radical dans une structure fédérale pour répondre aux besoins et aspirations socio-politiques des dans les différentes régions de notre pays ainsi que les impératifs d'une économie nationale prospère qui tire parti de la richesse de nos ressources naturelles vastes et diversifiées, afin d’assurer le bien-être de tous.
DW : Quels sont les principaux piliers de votre programme ?
Thierno Alex Diallo :: Tout d'abord, notre politique interne. Ensuite, pour avoir été élevé dans un pays où les femmes ont les mêmes droits que les hommes, la parité sera l’un pilier au sein de l´Alternative. Les hommes et les femmes ont droit à l'égalité de traitement et à la réalisation de soi. L'Alternative aura besoin d'intégrer beaucoup de femmes dans ses structures décisionnelles et s'efforcer d'atteindre la parité entre les sexes. Car nous reconnaissons que la majorité des jeunes guinéens veulent jouer un rôle constructif dans la création d'une nouvelle Guinée.
Étant donné que la jeunesse guinéenne constitue le segment le plus important de la population, et compte tenu des défis particuliers auxquels elle est confrontée dans le présent et dans le futur, il est impératif que la Guinée reconnaisse le rôle clé que les jeunes peuvent et doivent jouer dans notre société. La reconnaissance de ce fait devrait, selon L'Alternative, s'incarner dans une politique nationale de la jeunesse bien coordonnée.
Ainsi, notre parti, L'Alternative, intégrera les jeunes dans la direction politique du parti afin de fournir un espace pour l'inclusion de tous dans les processus de prise de décision politique.
Il est donc indispensable que notre parti prenne des mesures de précaution afin de préparer nos représentants et adhérents à de nouveaux défis et à la prise de responsabilité à l'intérieur et à l'extérieur du parti. C'est la tâche de notre éducation politique.
Nous sommes convaincus que l'éducation politique au sein du parti sera particulièrement efficace lorsqu'elle sera dirigée vers tous les membres du parti. Et pour garantir que les élections ajoutent de la valeur à la démocratie, une éducation électorale et démocratique est nécessaire pour tous les membres du parti.
DW : Et comment garantir une démocratie interne ?
Thierno Alex Diallo : L'Alternative dispose d'un système de rotation des salariés et des élus. Il s'agit à la fois d'éviter les politiciens de subsistance et de faire libérer l’espace pour de nouveaux visages. Les membres du parlement et les candidats à la présidence ne peuvent donc pas se présenter au référendum lors de la réunion annuelle après leur dixième année au parlement. Par ailleurs, les maires ne peuvent pas être réélus après deux mandats.
Pour revenir à votre question, nous avons un long programme politique bien pensé. C'est pourquoi je ne peux pas entrer dans les détails ici car ils sont nombreux mais vous aurez notre programme politique complet accessible via notre site internet dans les prochains jours où vous trouverez le programme en version française et anglaise. Pour ceux qui le souhaitent en format pdf il suffit de me contacter via mon email à : [email protected] ou via WhatsApp +4571516428
DW : Revenons à l’actualité sociopolitique en Guinée qui vient de connaître un coup de force militaire, le 5 septembre dernier, le deuxième en 11 ans. Selon vous, quels sont les maux dont souffre le peuple de Guinée après 63 ans d'indépendance ?
Thierno Alex Diallo : En Guinée, les leaders visionnaires et patriotes sont rares et beaucoup de Guinéens en ont marre du type de dirigeants qu'ils ont. La raison en est apparente. La plupart de ces dirigeants n'ont pas fait grand-chose pour améliorer le bien-être de notre peuple, qui croupit dans la pauvreté alors qu'eux et leurs copains vivent dans l'opulence.
Je pense que la Guinée a été dirigée par des gens qui manquent de vision et de direction. Ce pays ressemble à un avion piloté par des responsables politiques qui n'ont pas fait d'école de pilotage. Beaucoup de nos politiciens manipulent les systèmes électoraux en changeant les règles d'engagement en cours de route dans le but de rester au pouvoir.
La corruption reste la norme en Guinée. Et vous savez que la corruption est un cancer de l'économie et de la démocratie. Mais La Guinée a l'une des plus grandes populations dans sa jeunesse, qui peut influencer le leadership de la nouvelle génération.
Comment allez-vous faire pour changer cette mentalité de ces nombreux Guinéens qui sont déçus et pensent que les politiques ont échoué ?
Thierno Alex Diallo : Je leur recommanderai de lire notre programme politique et de rejoindre notre groupe sur les réseaux sociaux. Nous proposons de mettre en œuvre le modèle danois de libéralisme radical dans une structure fédérale pour répondre aux besoins et aspirations socio-politiques dans les différentes régions de notre pays ainsi que les impératifs d'une économie nationale prospère qui tire parti de la richesse de nos ressources naturelles vastes et diversifiées, afin d’assurer le bien-être de tous.
DW : Quel regard portez-vous sur le coup d’État militaire qui a renversé le pouvoir d’Alpha Condé ?
Thierno Alex Diallo : Un changement de régime était nécessaire pour donner une nouvelle chance à la Guinée. Le pays avait été pris en otage par Alpha Condé et son clan qui avaient usurpé le pouvoir. Je dirai que l’action du CNRD était opportun – sans aucun doute.
DW : La CEDEAO et l’UA ont condamné le putsch militaire. Êtes-vous surpris de l’attitude de ces institutions ?
Thierno Alex Diallo : Non. Mais je pense que la CEDEAO et la commission de l’Union africaine doivent s’inspirer des aspirations légitimes des populations africaines. Elles doivent travailler à mieux prévenir les crises. Les critères de démocratie et de bonne gouvernance doivent être les principaux piliers de développement de nos pays respectifs.
DW : Avez-vous confiance aux nouvelles autorités militaires qui ont pris le pouvoir en Guinée ?
Thierno Alex Diallo : Pour le moment oui. Mais nous continuerons à observer et nous sommes prêts à les aider dans le processus de transition notamment dans les domaines maritime et logistique, de l'énergie, de l'éducation et l'agriculture. Mais aussi dans bien d'autres domaines tant que cela se fera dans la transparence. On peut aussi leur ouvrir les portes ici dans les pays Scandinaves ainsi que dans d’autres pays où nous entretenons d’importantes relations qui peuvent bénéficier à la Guinée.
DW : Le CNRD conduit par le Colonel Mamadi Doumbouya est entrain de poser les jalons d'une transition inclusive. Dans quelle mesure cela constitue un signal fort ?
Thierno Alex Diallo : J’observe qu’il y a une volonté politique de changement. Cela va nous offrir une chance de faire de nouvelles propositions, quelque chose de nouveau qui pourrait donner une nouvelle perspective au paysage politique Guinéen. Une belle occasion pour jeter les bases d’une démocratie sincère.
Que souhaitez-vous dire aux Guinéens ?
Thierno Alex Diallo : Ça sera un message de solidarité, de compassion et d'unité nationale car si nous voulons que notre société soit inclusive, cohésive et pacifique, c'est le moment de favoriser une entente entre tous les Guinéens. Il n'y a pas de temps à perdre. Nous souhaitons bonne chance au gouvernement de transition.
Nous leur souhaitons de meilleurs résultats dans cette tâche difficile car s'ils réussissent, ce sera la Guinée qui gagnera. Enfin, je demande à la jeune génération de nous rejoindre dans l’Alternative et se familiariser avec le programme de notre parti politique. Que Dieu bénisse notre pays bien-aimé et ses enfants.
DW : Mr Diallo, merci.
Thierno Alex Diallo : Merci à vous Mr. Barry.