Peur au Tchad face aux affrontements entre rebelles et armée
19 avril 2021Des communiqués, des prises de parole, des images, vraies ou fausses, des habitants qui fuient N'Djamena et font des stocks de nourriture. C'est encore un climat d'agitation et de peur qui règne au Tchad ce lundi 19 avril. Certes, des chars et de nombreux militaires sont positionnés samedi à l'entrée nord de la ville. Mais la population s'inquiète face aux affrontements entre l'armée nationale et les factions rebelles du Front pour l'alternance et la concorde au Tchad (FACT). Des sources militaires assurent à l'Agence France Presse que le président Idriss Déby aurait lui-même dirigé des opérations dimanche.
Les rebelles du FACT ont fait récemment incursion sur le territoire tchadien et annoncent maintenant être en passe de contrôler la province du Kanem après la région du Borkou-Ennedi-Tibesti (BET).
L'état-major de l'armée nationale assure de son côté avoir mis en déroute ces rebelles au terme des violents affrontements samedi 17 avril. L'armée dit même avoir fait 150 prisonniers. Pas de quoi rassurer les habitants : samedi, certaines sources faisaient état de la progression de ces groupes rebelles vers la capitale.
"Il faut un dialogue !"
Face à la situation, des voix s'élèvent pour appeler les différentes parties à privilégier l'option politique plutôt que les armes. "La situation est grave, je souhaite vraiment qu'on arrête tout cela et qu'on se mette à dialoguer pour trouver une solution", dit par exemple Abderamane Djasnabaye, coordonnateur des partis politiques de la majorité présidentielle et ambassadeur de la paix auprès de la Francophonie et des Nations unies. "On a vu comment les gens couraient dans tous les sens en février 2008 pour sortir de N'Djamena avec tout ce qu'il y a comme traumatisme pour les enfants. Donc nous ne voulons plus vivre cela", espère-t-il.
Abderamane Djasnabaye en appelle à la communauté internationale, pour aider à l'organisation d'un dialogue. "Nous ne sommes plus en cette période où il faut prendre le pouvoir (par les armes, ndlr). On va reculer. Évitons cette guerre-là dans la capitale. Quel que soit le vainqueur, nous allons tous perdre", avertit-il.
Des inquiétudes partagées par Max Kemkoye. "Les circonstances actuelles avec des élections que les Tchadiens ont refusées, en plus du refus des résultats qu'on essaye de distiller depuis quelques jours, tout cela montre que nous sommes en face d'une situation ténébreuse", redoute le président du parti "Union pour le développement et le progrès" (UDP). "Les groupes armés sont prêts à une option politique, mais le gouvernement doit la mettre sur la table", recommande-t-il.
Le jeune opposant Succès Masra, leader de la formation politique "Les Transformateurs" a lui publié une déclaration qu'il a signé avec d'autres opposants et des responsables d'organisations de la société civile tchadiennne. Les signataires invitent "les forces militaires belligérantes à faire une déclaration solennelle de cessez-le-feu sur l'ensemble du territoire national afin de créer les conditions nécessaires pour la tenue d'un dialogue national inclusif" et demandent au président Idriss Déby d'accepter l'idée de ce dialogue d'ici à dimanche prochain.
"Situation sous contrôle"
Côté gouvernement justement, aucun de ses membres contactés n'était disponible, dimanche, pour réagir au micro de la Deutsche Welle, mais à travers deux communiqués de presse, le ministère tchadien des Affaires étrangères et l'état-major général des armées assuraient que la situation était sous contrôle.
Plusieurs représentations diplomatiques au Tchad telles que les ambassades des Etats-Unis et le Royaume-Uni ont quant à elles demandé à leurs ressortissants de quitter le Tchad, craignant des affrontements en pleine capitale.
Les communications téléphoniques ont été perturbées dans le pays dimanche. Et dans la soirée, le groupe Union des forces pour la résistance a apporté son soutien aux rebelles du FACT qui ont annoncé une incursion dans le Nord du pays, le jour de présidentielle.