Nancy Pelosi est à Taïwan malgré les mises en garde de Pékin
2 août 2022La présidente de la Chambre des représentants des Etats-Unis, Nancy Pelosi, avait entretenu le suspense sur son éventuelle escale à Taipei dans le cadre de sa tournée en Asie débutée ce lundi (01.08).
La leader démocrate est donc arrivée ce mardi soir (02.08) à Taïwan. Elle a affirmé que sa visite montre le "soutien inconditionnel" des Etats-Unis à l'île et qu'elle ne "contredit" pas la politique américaine vis-à-vis de la Chine.
La Chine, qui considère l'île de 22 millions d’habitants comme faisant partie de son territoire et que Pékin veut reconquérir, parle d’une pure provocation et affirmait peu avant l'arrivée de Nancy Pelosi qu’en cas de visite, les Etats-Unis devront "payer le prix de leur atteinte à la souveraineté et à la sécurité de la Chine".
Le président chinois Xi Jinping avait également déjà averti Joe Biden lors d’une récente conversation téléphonique de ne "pas jouer avec le feu".
Le pouvoir chinois bénéficie dans ce dossier du soutien de la Russie. Moscou accuse ce mardi Washington de "déstabiliser le monde".
Pékin ne veut pas perdre la face
Selon Shi Yinhong, professeur de relations internationales à l'Université Renmin de Chine et qui s'exprimait avant cette visite, les avertissements de Pékin sont à prendre au sérieux.
"Je ne pense pas que quiconque puisse prédire dans le détail ce que la Chine fera militairement en réponse à cette visite. Mais je pense que Pékin lancera une certaine forme de mesures militaires, même si elles ne devraient pas présenter un risque substantiel de conduire à un conflit", estime le professeur dans une interview à la DW.
S'exprimant aussi avant la confirmation de cette visite, Amanda Hsiao, experte de la Chine au sein du groupe de réflexion International Crisis Group (ICG), pense que Pékin sera quasiment contraint de réagir, au risque de paraitre affaibli et d’ouvrir la porte à d’autres visites de leaders occidentaux.
"La Chine dispose de plusieurs options pour montrer à quel point elle s'oppose à ce voyage", note Amanda Hsiao, qui ajoute toutefois que "la Chine fera très attention" pour éviter un engrenage dans lequel une erreur de calcul pourrait "dégénérer en quelque chose de plus important."
Démonstrations de force
La Chine considère Taïwan comme faisant partie de son territoire et s'engage à "unifier" l'île, gouvernée démocratiquement, avec le continent, en recourant à la force si nécessaire.
Ces dernières années, et notamment depuis l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping, l’armée chinoise a intensifié ses manœuvres d'intimidation militaire contre Taïwan.
Les démonstrations de force passent par des survols d’avions de combats, de surveillance, mais aussi par l’envoi de navires de guerre dans le détroit de Taïwan.
Si Washington n'a pas de relations diplomatiques officielles avec Taipei, les Etats-Unis entretiennent d'étroites relations, en vendant notamment du matériel militaire à Taïwan à des fins d'autodéfense, malgré l’opposition de Pékin. Les navires de guerre de la marine américaine traversent aussi régulièrement le détroit de Taïwan.
Le président américain Joe Biden a d'ailleurs réaffirmé au mois de mai que les Etats-Unis prendraient la défense de Taipei en cas d'attaque de la Chine.
Les Taïwanais sont mitigés
Avant sa venue, les Taïwanais affichaient des avis partagés sur la visite de Nancy Pelosi. "La visite de Nancy Pelosi pourrait être utile aux relations entre la Chine et les Etats-Unis, mais je crains également que la Chine punira Taïwan par des actions déraisonnables", estimait Evonne, une résidente de la ville de Taoyuan.
Selon l’entrepreneure Kathy Cheng, "sa visite pourrait donner à Taïwan une plus grande visibilité internationale. D’un autre côté, je ne suis pas sûre que les gens écoutent vraiment ce que Taïwan a à dire. Ils se concentrent uniquement sur ce que disent les Etats-Unis et la Chine."