RDC: Amnesty International dénonce l'état de siège
10 mai 2022Amnesty International souligne qu'en Ituri et dans le Nord-Kivu, les autorités militaires congolaises ont utilisé les pouvoirs exceptionnels conférés par l'état de siège pour porter encore plus atteinte aux droits des personnes, en toute impunité.
Amnesty International dénonce notamment des entraves au droit à la liberté d’expression, de réunion et au droit à la justice. Dans cet entretien qu'il nous a accordé, Jean-Mobert Senga, chercheur chez Amnesty International, revient sur les grands axes rapport de l'ONG.
DW : Pouvez vous brièvement nous dire les grandes lignes de votre rapport ?
Jean-Mobert Senga: Le rapport, qui s'intitule "La justice et les libertés, sous état de siège en Ituri et au Nord Kivu, " montre comment cette mesure exceptionnelle a été déclarée en violation des obligations de la RDC en matière de droit international des droits de l'Homme, la Convention internationale sur les droits civils et politiques, y compris également l'obligation de s'assurer que toute restriction des droits garantis par les traités internationaux puisse être nécessaire, proportionnelle et limitée dans le temps. Malheureusement, les restrictions de liberté d'opinion et d'expression, de manifester pacifiquement, de mouvements et autres ont été faites de manière trop large, sans lien direct avec le but principal de cet état de siège qui a été de restaurer la paix et d'assurer rapidement la protection des civils. La deuxième chose que nous montrons dans ce rapport, c'est que les autorités militaires et policières dans les deux provinces se sont servies des pouvoirs extraordinaires qui leur ont été accordés par le président Tshisekedi pour faire taire toute voix discordante.
DW : Dans ce rapport, vous dites également que la militarisation du système judiciaire a encore mis en péril l'accès à la justice. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Jean-Mobert Senga: D'après le président et le gouvernement, be but de cet état de siège peut se résumer en deux bouts de phrase : mettre fin rapidement à l'activisme des groupes armés et améliorer rapidement la protection des civils. Il n'y a aucun lien direct entre ces deux objectifs et la militarisation de la justice. De plus, cette militarisation s'est faite de manière indistincte pour toutes les infractions et ce en violation flagrante de la Constitution de la RDC et des normes internationales. Si l'objectif était d'utiliser la justice comme moyen de ramener la paix, on aurait dû se focaliser sur la répression, les poursuites pour les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre qui se commettent dans la région.