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A Rutshuru, l'insécurité bloque les activités agricoles

Zanem Nety Zaidi
31 mai 2023

Dans la zone de Rutshuru, dans l'est de la RDC, l'insécurité empêche les femmes d'aller travailler dans les champs.

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Des soldats qui combattent le M23 à Rutshuru en 2022
L'insécurité empêche les agriculteurs de se rendre dans les champsImage : Guerchom Ndebo/AFP/Getty Images

Dans l'est de la République démocratique du Congo, la zone de Rutshuru reste en grande partie occupée par les rebelles du M23, et ceci en dépit du déploiement du contingent militaire fourni par la Communauté d'Afrique de l'Est. Redoutant d'être recrutés de force par le M23, beaucoup d'hommes ont fui la région et les femmes qui sont restées sont souvent les seules à pouvoir entretenir les cultures. Mais se rendre dans les champs c'est, pour ces femmes, prendre le risque d'être violée ou assassinée par les combattants du M23. Les récoltes pourrissent donc souvent sur pieds et le peu qui est sauvé ne peut être vendues car la route vers Goma, le chef-lieu de la province du Nord-Kivu, est coupée. 

Un chemin dangereux

Anuarite Ndiubanzi est rentrée chez elle, à Kiwanja, plus tôt que prévue. Elle a tenté de rejoindre son champ pour trouver à manger mais la nouvelle de l'enlèvement d'une femme, la veille, l'a incitée à rebrousser chemin.

"On vient de nous informer en cours de route qu'une femme a été enlevée hier sur le chemin de son champ, c'est pourquoi nous venons de rentrer. Elle a été amenée vers une destination jusque-là inconnue" explique à la DW l'agricultrice. 

Sa voisine, Florence Bahati, elle, n'a plus, depuis plusieurs semaines, le courage de se rendre aux champs.

"Actuellement, l'atmosphère dans nos champs fait trop peur. Il faudrait que les hommes y aillent désormais car nous, les femmes, sommes exposées à beaucoup d'actes ignobles. Nous ne pouvons plus entretenir nos cultures" déplore Florence.

Un marché bloqué

Certains agriculteurs qui, malgré la peur, prennent le risque d'aller couper les récoltes ont ensuite de grandes difficultés pour vendre leurs produits à des prix corrects.

Ecoutez les précisions de Zanem Nety Zaidi

Selon eux, le marché est bloqué en raison de la fermeture de la route Rutshuru-Goma et du fait que certains rebelles vendent les produits agricoles issus de champs abandonnés.

"Nous regrettons beaucoup le temps que nous avons passé à cultiver nos champs, et aussi l'argent dépensé pour acheter les semences. Regarde cette cuvette de haricots que je vais vendre à 300 francs congolais. Ces gens (les rebelles, ndlr) nous rendent un très mauvais service et nous ne faisons que souffrir " explique Innocent Ntumba un agriculteur dans la cité de Rutshuru. Il demande par ailleurs : "Que le gouvernement nous ouvre la route afin que les acheteurs atteignent Rutshuru, et nous verrons si nos activités pourront de nouveau marcher ". 

Le M23 toujours actif

La société civile du territoire de Nyiragongo, où sont situés la plupart des déplacés venus de Rutshuru, estime qu'il est trop tôt pour autoriser la réouverture du trafic routier entre Goma et Rutshuru.

Il n'est pas non plus question, selon elle, d'encourager les habitants qui ont fui à rentrer chez eux car la zone n'est pas pacifiée et les rebelles du M23 y sont toujours actifs.

Selon Mambo Kawaya le président de cette structure citoyenne: "On ne peut pas autoriser les gens à revenir à Rutshuru. Si quelqu'un veut rentrer chez lui, qu'il y aille de sa propre volonté mais nous, en tant que société civile, ne pouvons pas demander aux gens de retourner dans leurs villages de peur qu'ils soient massacrés, et leur sang pèserait peut-être à l'avenir sur notre conscience."

La circulation sur la route Goma-Rutshuru avait été interdite par le gouverneur militaire du Nord-Kivu, juste après la prise de ce territoire par les rebelles du M23, l'année dernière.

Vue aérienne de Goma
Zanem Nety Zaidi Correspondant à Goma en RDC pour le programme francophone de la Deutsche WelleZanemNety