Le gouvernement congolais accuse le M23 d'exactions
5 décembre 2022Au départ, le bilan de l'attaque de Kishishe, dans le Rutshuru (est de la Rdc), une zone que les rebelles du mouvement du 23 mars occupent depuis plusieurs mois, était d'une cinquantaine de morts. Mais, le ministre de la Communication et Médias, Patrick Muyaya, par ailleurs porte-parole du gouvernement fait état de 122 morts. Le président du M23, Bertrand Bisimwa a nié ces accusations. Il reconnaît que huit civils ont été tués, par des "balles perdues", durant les affrontements qui ont opposé ses combattants à des miliciens le 29 novembre dans ce village du territoire de Rutshuru.
Deuil national
Le samedi 3 décembre, les autorités congolaises ont décrété un deuil national de trois jours après ce massacre attribué aux rebelles du M23 dans l’est du pays."En leur mémoire (des victimes), le président de la République a chargé le gouvernement de décréter 3 jours de deuil national à observer à partir de ce samedi 3 décembre 2022. Le drapeau sera mis en berne sur tout le territoire national durant cette période", a déclaré samedi le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya, faisant le compte-rendu du conseil des ministres tenu vendredi et présidé par Félix Tshisekedi. Pour les analystes politiques congolais, comme Evariste Iragi, le deuil national décrété par le gouvernement n'est pas suffisant.
Selon lui, "si le gouvernement congolais a décrété trois jours de deuil national, c'est parce qu'il a voulu dans un premier temps solidariser avec ceux là qui ont perdu les leurs." Evariste Irag ajoute que "dans un second temps, il (le gouvernement congolais) a voulu dénoncer le comportement barbare qu'adopté le groupe armé M23 qui est contraire au droit international humanitaire, au droit de la guerre mais ces mesures en elles-mêmes, quoique importantes, ne sont pas suffisantes parce que on attend du gouvernement congolais qu'il puisse engager des fronts violents et qui peuvent aboutir à ce que les reblles du M23 puissent se retirer des zones déjà occupées."
Satisfaction
Les habitants de Goma, qui suivent les affrontements entre les forces armées congolaises et les rebelles du M23, à une vingtaine de kilomètres du chef-lieu de la province du Nord-Kivu, ont bien accueilli cette mesure. Beaucoup d'entre eux estiment que les exactions commises par les rebelles du M23 est une preuve de lâcheté. "Je salue la décision des autorités nationales parce que ça faisait longtemps qu'on a demandé que nos morts soient traités de la même manière, que notre deuil soit le deuil de tous les congolais", estime Pacifique, habitant de Goma et musicien engagé.
"Cela fait des années que nous mourons dans l'est, plus de 10 millions de morts mais pour la première fois nous voyons que nos autorités se soucient un peu de faire le deuil avec nous. Après moi je pense qu'on massacre une population civile, qui est inoffensive, c'est vraiment lâche", ajoute Pacifique.
Enquête
Le président congolais Félix Tshisekedi, a demandé l'ouverture d'une enquête internationale, afin d'éclaircir les circonstances de ces exactions.Mais, la société civile attend des actions concrètes.
"Organiser trois jours de deuil national, c'est une belle action à titre symbolique, malheureusement nos autorités se contentent beaucoup plus avec les actions symboliques mais ne font pas du tout les actions concrètes, les actions concrètes pour mettre fin à la situation qui perdure depuis plusieurs années et quand le gouvernement commence à se contenter des actions symboliques, c'est un aveu d'échec. Cela démontre une fois de plus que les autorités congolaises, avec l'appui de casques bleus des Nations unies, la Monusco, ont lamentablement échoué pour apporter la sécurité" affirme Espoir Ngalukiye, militant du mouvement citoyen Lutte pour le changement, Lucha.
Pour communiquer avec leurs compatriotes de Kishishe et d'autres villes du Nord Kivu victimes de massacres au quotidien, plusieurs jeunes de la ville de Goma organisent aujourd'hui une journée d'hommage pour saluer la mémoire des victimes.
Des marches ont été organisées le dimanche 5 décembre par l'Eglise catholique dans quasiment tout le pays.