Disparition d’un journaliste critique du pouvoir au Rwanda
16 février 2023Cela fait un peu plus d’une semaine que ce journaliste, critique du pouvoir rwandais, a disparu. Nuhu Bihibindi devait se rendre dans la ville de Musanze, dans le nord du Rwanda, pour un séminaire. Mais personne ne l’a vu à ce séminaire.
Sa famille ne communique pas sur le sujet et le numéro de téléphone du journaliste sonne dans le vide. Sur les réseaux sociaux, quelques rares personnes se hasardent à signaler la disparition du journaliste, fondateur dujournal en ligne, Umuyoboro.
Dans son dernier tweet du 8 février dernier, Nuhu Bihibindi écrivait que "même si l’on échappe au danger, le danger n’est jamais loin".
Question sensible
Contactées, plusieurs associations de journalistes et d’ONG de droits de l’Homme préfèrent rester prudentes en raison de la faiblesse des informations disponibles. Preuve que la question est sensible, une autre ONG de droits de l’Homme a invoqué des enjeux de sécurité pour refuser de nous accorder une interview. Enfin, la Fédération internationale pour les droits humains nous a exprimé son inquiétude sur le sort de Nuhu Bihibindi. La FIDH dit travailler à vérifier et confirmer cette disparition dans un espace de liberté qu’elle qualifie de "très restreint".
Il faut rappeler que Nuhu Bihibindi avait dit aux médias qu'il était en compagnie du journaliste John Ntwali avant qu'il ne soit tué le jour suivant, dans un accident de la route. Le rédacteur en chef du journal en ligne The Chronicles, lui aussi critique vis-à-vis du pouvoir, avait vu la moto de son collègue percutée par un véhicule.
Menaces sur les voix critiques
L’ONG Human Rights Watch avait jugé "floues" les circonstances de la mort du journaliste d’investigation John Ntwali. Reporters sans frontières (RSF) a évoqué pour sa part un possible assassinat.
Nuhu Bihibindi avait par la suite commenté la mort de John Ntwali dans plusieurs médias internationaux.
Plusieurs journalistes et Youtubeurs font régulièrement l’objet de menaces au Rwanda. Kigali est critiqué par des ONG de défense des droits humains pour la répression de la liberté d’expression. Au classement de Reporters sans frontières, le pays est classé 136e sur 180 pays. RSF évalue à huit le nombre de professionnels des médias qui ont été tués ou sont portés disparus depuis 1996, deux ans après le génocide rwandais. 35 autres professionnels ont été contraints à l’exil, toujours selon RSF.