Diomaye Faye veut faire un audit de l'économie sénégalaise
11 avril 2024Flambée des prix et taux de chômage galopant, l’économie sénégalaise est dominée à plus de 70% par le secteur informel. Ses indicateurs ne sont pas au vert. Ils ne l’ont jamais été, regrette Mor Gassama, économiste, enseignant chercheur à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar.
"Depuis le lancement du Plan Sénégal Emergent PSE, le Sénégal a l’habitude d’enregistrer un taux de croissance élevé, si on enlève la parenthèse Covid-19. Malheureusement, ce fort taux de croissance ne reflète pas le niveau de vie de la population, et au même moment, on constate aussi que la pauvreté ne recule que très faiblement. C’est pourquoi on l’a qualifié d’être la croissance extravertie. Donc pour ce nouveau gouvernement, moi je pense que les efforts devraient être concentrés sur les secteurs de croissance inclusive’’, estime Mor Gassama.
Miser sur l'agriculture
Pour sa part, l’économiste Souleymane Kéita, enseignant chercheur au laboratoire d’économie appliquée de la faculté des sciences économiques et de gestion (FASEG) à Cheikh Anta Diop affirme que, "le secteur qui est prêt à absorber le taux de chômage aujourd’hui, c’est l’agriculture, l’agroalimentaire et l’industrialisation de l’économie sénégalaise. Et éventuellement le secteur de la pêche qui peut aussi jouer un rôle important dans la relance de la croissance économique.’’
Stabilité politique attractive
Les forces de l’économie sénégalaises résident dans la stabilité politique du pays, une administration bien formée et un secteur privé très dynamique, dit pour sa part l’économiste Cheikh Oumar Diagne. Il regrette que, malgré 64 ans d’indépendance, l’économie du pays peine à décoller véritablement parce que "les modèles utilisés, le plus souvent, ne lui correspondent pas. Elle demeure une économie de services et dépendante de l’extérieur même pour des besoins de base."
Joint par la DW, Cheikh Oumar Diagne ajoute par ailleurs que, "l'économie sénégalaise continue d’avoir une balance commerciale structurellement déficitaire. Le secteur informel concentre plus de 92% des emplois de l’activité. Un Produit Intérieur Brut (PIB) par tête qui stagne depuis 1960. A titre illustratif, on peut dire qu’en 1960, le PIB par tête tournait autour de 1050 dollars par habitant. En 2020, il se situe à presque 1300 dollars pendant que d’autres pays ont multiplié par 20, 30, voire 40 leur PIB par tête. L’économie est toujours spécialisée dans l’attraction des investissements étrangers ; des IDE, et se spécialise dans l’exportation de matière première qui n’est pas vraiment à forte valeur ajoutée et qui ne règle pas le problème de l’emploi."
Le tissu économique du Sénégal est assez fragile, dit encore Cheikh Oumar Diagne qui précise que plus de 90% des entreprises ont des chiffres d’affaires de moins de 100 millions de francs CFA. Plus de 60% du capital des banques présentes au Sénégal, appartient à des étrangers qui font essentiellement du profit.