Thomas Sankara - le révolutionnaire intègre
25 janvier 2018Thomas Sankara est qualifié de visionnaire par ses partisans, encore nombreux aujourd'hui. Il fut à la tête de la révolution du 4 août 1983 dans l'ancienne Haute-Volta. L'influence du sankarisme perdure, malgré son assassinat survenu le 15 octobre 1987.
Sa vie : Né en 1949, le capitaine Thomas Sankara arrive à la tête du pouvoir lors de la première révolution du 4 août 1983.
Avec ses compagnons de lutte, il rebaptise la Haute-Volta, nom hérité des colons Français, en République démocratique et populaire du Burkina Faso, ce qui veut dire le "pays des hommes intègres".
Il est renversé par un de ses plus proches camarades, Blaise Compaoré, puis assassiné le 15 octobre 1987 avec douze de ses compagnons.
Connu pour : avoir tenté de faire de son pays d'Afrique de l'Ouest un laboratoire agricole afin d'arriver à une autosuffisance alimentaire. Il a promu avant l'heure le made in Burkina, voulant favoriser la fabrication et la consommation locales. "Le camarade-président du Burkina" a voulu améliorer le système de santé et l'éducation dans un pays qui était l'un des plus pauvres du monde. Il avait lui-même un train de vie modeste. Il a aussi fait de l'émancipation des femmes un des traits majeurs de sa politique.
Critiqué pour : ses liens avec la Libye du colonel Khadafi, mais aussi pour avoir dérangé l'ordre établi. En 1985, un conflit est même survenu avec le Mali au sujet de la frontière entre les deux pays.
Source d'inspiration : Le chef de l'Etat burkinabè a fustigé la dette et les institutions de Bretton Woods, héritées selon lui du colonialisme, dans un discours historique prononcé en juillet 1987 à la tribune de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), à Addis-Abeba.
Près de trois décennies après son assassinat, le capitaine est toujours vu comme un héros par les Burkinabè qui ont renversé le régime de Blaise Comparé en octobre 2014. Il est pour beaucoup une icône de la jeunesse africaine.
Un projet de mémorial est en cours à Ouagadougou.
Citations : "Les origines de la dette remontent aux origines du colonialisme. Ceux qui nous ont prêté de l'argent, ce sont eux qui nous ont colonisés. Ce sont les mêmes qui géraient nos économies. Ce sont les colonisateurs qui endettaient l'Afrique auprès des bailleurs de fond, leurs frères et cousins. Nous sommes étrangers à la dette. Nous ne pouvons donc pas la payer."
"Je ne suis ni un messie ni un prophète. Je ne détiens aucune vérité. Ma seule ambition est une double aspiration : premièrement, pouvoir, en langage simple, celui de l'évidence et de la clarté, parler au nom de mon peuple, le peuple du Burkina Faso ; deuxièmement, parvenir à exprimer aussi, à ma manière, la parole du "Grand peuple des déshérités", ceux qui appartiennent à ce monde qu'on a malicieusement baptisé Tiers Monde. Et dire, même si je n'arrive pas à les faire comprendre, les raisons que nous avons de nous révolter."
"Nous voulons être les héritiers de toutes les révolutions du monde, de toutes les luttes de libération des peuples du Tiers-Monde."
Controverse : La lumière n'a toujours pas été faite sur les circonstances et les responsables de sa mort lors du coup d'Etat de 1987. Sa veuve Mariam Sankara réclame toujours justice.
Des tests ADN ont été effectués sur les supposés restes du leader burkinabè mais ils ne se sont pas révélés concluants.
Un mandat d'arrêt international a été émis contre l'ancien président en exil Blaise Compaoré. Et de nombreuses voix s'élèvent pour demander à la France d'ouvrir ses archives pour savoir si l'ancienne puissance coloniale est impliquée dans la mort du "Che Guevara africain".
Claire-Marie Kostmann a contribué à ce récit qui fait partie de la série "Racines d'Afrique". Une série lancée début 2018 par la Deutsche Welle, en coopération avec la Fondation Gerda Henkel.