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Allemagne : être pauvre dans un pays riche // Le Canada est-il encore un pays d'accueil ?

27 mars 2024

Plus de 14 millions de personnes sont considérées comme pauvres en Allemagne, selon le rapport paritaire 2024 sur la pauvreté. Comment est-ce possible dans un pays aussi riche ? // Le Canada a une tradition d'accueil pour les migrants, mais le pays prend des mesures pour réguler les arrivées sur le territoire.

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Mangue, avocat, tomates... Les fruits et légumes frais sont très demandés dans cette banque alimentaire organisée comme un marché hebdomadaire dans un quartier de Berlin. 

Videostill Armut in Deutschland
Image : Tina Gerhäusser/DW

Chaque lundi, contre un euro symbolique, des personnes dans le besoin viennent faire leur choix parmi des denrées proches de la date-limite de consommation, des dons fournis par des supermarchés ou des commerces alimentaires.

La distribution est organisée principalement par des bénévoles. Les "Tafel" fournissent à plus de deux millions de personnes un complément nécessaire pour manger à leur faim.

Le sentiment d'exclusion des personnes dans le besoin

"Ce qui m'a demandé le plus d'efforts, c'est d'aller à la banque alimentaire. Là, j'ai eu honte", témoigne Matthias Hernandez-Lopez, 57 ans. Ancien détective de supermarché, il surprenait souvent des personnes âgées en train de voler de la nourriture - par nécessité.

Après une crise cardiaque, il s'est retrouvé au chômage, puis mis en pré-retraite. Aujourd'hui, il est lui-même touché par la pauvreté.

"On a parfois l'impression d'être exclu, d'être comme je dirais des 'personnes de troisième classe', dont on dit : oui, il est pauvre, il n'a rien. Mais ce n'est pas cela qui fait un homme, qu'on ait de l'argent ou non."

La pauvreté relative : calculée selon la prospérité

Deutschland | Ulrich Schneider stellt den Bericht "Armut in der Inflation" vor
Image : Fabian Sommer/dpa/picture alliance

Matthias Hernandez-Lopez fait partie des 14,2 millions de personnes qui vivent en-dessous du seuil de pauvreté en Allemagne, d'après le dernier rapport sur la pauvreté du Paritätischer Gesamtverband, la fédération des associations caritatives allemandes. Jonas Pieper est l'un des auteurs de ce rapport :

"Dans le rapport sur la pauvreté, nous utilisons le concept de pauvreté relative, c'est-à-dire qu'on la mesure d'après le niveau de prospérité de la société dans laquelle une personne vit. En d’autres termes, il s’agit de la participation à la société dans laquelle une personne vit, et cela nécessite de l’argent. Si l'on regarde maintenant au niveau individuel, le seuil de pauvreté se situe actuellement à 1186 euros par mois pour une personne célibataire. Cela peut paraître beaucoup et c'est bien sûr beaucoup d'argent, mais il faut le mettre en relation avec le coût de la vie, qui est très élevé en Allemagne."

Les 1186 euros mentionnés correspondent à 60% du revenu médian en Allemagne. Il s'agit du revenu net total d'un ménage, c'est-à-dire comprenant les allocations de logement, les allocations familiales ou autres transferts sociaux. Pour un ménage composé de deux adultes avec deux enfants, il peut aller jusqu'à 2965 euros selon l'âge des enfants.

Plus d'un enfant sur cinq touché par la pauvreté

"Si on regarde qui est le groupe de ces 14,2 millions de personnes qu'on doit qualifier de pauvres en Allemagne, alors ce sont principalement des personnes qui ont un emploi, des personnes qui sont à la retraite ou bien des enfants", explique Jonas Pieper.

Berlin | Besucher und Helfer in einer Tafel in Berlin
Image : DW

"Si on regarde maintenant quels sont les groupes les plus exposés au risque de pauvreté, on doit dire qu'il s'agit en particulier de familles monoparentales, de familles nombreuses, de personnes ayant un faible niveau de formation ou de personnes qui n'ont pas la nationalité allemande."

Le nombre de personnes pauvres a très légèrement baissé (-0,1 point) en Allemagne, par rapport au précédent rapport. Mais le rapport souligne que la pauvreté des enfants a atteint un nouveau niveau record : plus d'un enfant sur cinq est désormais touché par la pauvreté. 

A la banque alimentaire de Berlin où nous avons rencontré Matthias Hernandez-Lopez, Andreas, 14 ans, est lui aussi venu chercher de quoi manger.

"Ca nous aide - financièrement, pour pouvoir manger. Parce que tout est devenu plus cher. C'est pour ça que nous sommes ici. Pour se procurer de la nourriture".

Les inégalités se creusent en Allemagne

Le gouvernement allemand a bien mis en place des mécanismes pour lutter contre la pauvreté, notamment en 2022, avec une allocation exceptionnelle pour répondre à l'inflation record.

Mais selon les associations caritatives, les mesures prises n'ont eu qu'un effet temporaire et la légère baisse constatée de la pauvreté risque de ne pas durer.

Alors que l'Allemagne élit l'an prochain son nouveau Parlement, les débats politiques se concentrent sur le montant du "Bürgergeld", l'allocation citoyenne en vigueur depuis 2023, et sur la nécessité d'inciter les allocataires à travailler. Les partis conservateurs réclament notamment un durcissement des sanctions envers les récalcitrants.

Les associations caritatives appellent à ne pas se focaliser sur la question du travail, qui ne concerne qu'un tiers des personnes touchées par la pauvreté.

Elle soulignent en revanche le creusement des inégalités en Allemagne : alors que le taux de chômage est faible (5,3%), que le nombre de bénéficiaires de l'aide sociale est à son plus bas niveau depuis une vingtaine d'années et que les revenus augmentent constamment, le taux de pauvreté reste élevé : de 14,7% en 2005, il est aujourd'hui à 16,8%. 

Augmenter le salaire minimum, entre autres

Raison pour laquelle le rapport partitaire appelle à une une vraie politique de lutte contre la pauvreté, comme le détaille Jonas Pieper :

"Pour nous, les leviers décisifs sont l'augmentation du salaire minimum à 15 euros, l'introduction d'une allocation de base pour les enfants qui protège réellement de la pauvreté, des retraites plus élevées, l'introduction d'une assurance dépendance solidaire et complète qui prenne en charge tous les coûts liés aux soins. Et puis, nous voyons ces dernières années, du moins dans les villes, que les loyers deviennent un problème pour de nombreuses personnes, notamment pour les personnes à faibles revenus. C'est pourquoi nous demandons une politique très cohérente dans le domaine des loyers, qui permette de les réduire."

Des mesures qui risquent de coûter cher, à un moment où le gouvernement allemand multiplie les économies. Les associations caritatives plaident pour une participation plus importante des hauts revenus à la cohésion sociale, par exemple en réintroduisant l'impôt sur la fortune.

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S’établir au Canada, un vrai parcours du combattant

Rose Moussa, 22 ans, originaire du Tchad
Rose Moussa, 22 ans, est arrivé du Tchad à Calgary, il croyait trouver un paradis mais se rend compte des difficultés...Image : Justine Leblond/DW

Le Canada est considéré comme un modèle en matière d’immigration. En 2023, le gouvernement de Justin Trudeau s’est fixé un objectif : recevoir 500 000 personnes par an à partir de 2025 afin de tripler la population canadienne d’ici à 2100 !  

Sauf qu’avec l’inflation qui grimpe, la crise du logement, le manque de médecins… la politique migratoire canadienne est de plus en plus critiquée.

Et ces derniers mois, le gouvernement prend de plus en plus de mesures pour limiter les visas temporaires pour réguler les arrivées sur le territoire. 

Reportage à Calgary, dans l’ouest canadien, de notre correspondante Justine Leblond