Putsch au Burkina : après l'euphorie, les critiques
28 janvier 2022"Nous avons donné le pouvoir aux militaires pendant 50 ans dans ce pays et on connaît le résultat", déplore Victorien Tougouma, président du Mouvement africain des peuples. Le maire de l'opposition et candidat à la présidentielle de 2015 condamne l'accession au pouvoir par les armes.
"Chaque fois qu'il y a un problème, on incite l'armée à prendre le pouvoir pour avoir de petits avantages de ministres. Donc voilà notre principe : condamner le coup d'Etat, accuser la classe politique qui a transformé cette mutinerie en coup d'Etat parce qu'elle n'a pas réagi assez tôt. J'entends dire que Damiba est l'homme fort du Burkina. Il n'y a pas d'homme fort au Burkina. L'homme fort c'est le peuple."
Pour le rétablissement de l'ordre constitutionnel, Victorien Tougouma propose la libération du chef de l'Etat Roch Kaboré. "On le rétablit. Il rétablit l'Assemblée et signe l'ordre d'amnistie pour les militaires", suggère l'opposant. "On donne le poste de Premier ministre aux soldats putschistes pour qu'ils puissent garantir leur sécurité et avoir les moyens de mettre en œuvre la politique de l'armée puisqu'elle décidera du budget…"
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Contre le retour du président Kaboré
Alexandre Sankara, vice-président des Progressistes unis pour le renouveau, condamne le coup d'Etat de janvier mais s'oppose à la gouvernance de Roch Marc Christian Kaboré.
"Ne pas approuver le coup d'Etat ne veut pas dire qu'on est pour le régime déchu", souligne-t-il. Tout en reconnaissant qu'"il avait beaucoup d'insuffisance", il estime que "ce ne n'est pas une raison pour que l'armée s'immisce dans la vie républicaine. Il y a des chantiers à baliser pour permettre à ceux qui vont venir de ne pas rencontrer les mêmes problèmes, les mêmes difficultés que l'ancien pouvoir."
La junte au pouvoir, selon Victorien Tougouma, est dans une impasse. "Quelle élection peut-on organiser au Burkina avec la situation sécuritaire ?", interroge-t-il, en comparant la situation avec le Mali : "On se retrouvera dans le cas du Mali où Goïta aujourd'hui est dans une impasse. Il ne peut pas organiser des élections parce que le territoire est occupé. S'il quitte le pouvoir il prend des risques. Ces mêmes militaires qui sont dans cette impasse vont se retrouver dans la même situation."
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Certains acquis ne doivent pas être remis en cause, met en garde Alexandre Sankara. "Nous avons chèrement obtenu des acquis. Il s'agit de la démocratie et des procès, particulièrement le dossier Thomas Sankara. Sinon, ils risquent de se retrouver dans la même situation que ceux qu'ils ont chassés."
Les concertations initiées par la junte suscitent donc l'attention des Burkinabè.