Entre l'UE et la Tunisie, un accord migratoire embarrassant
24 juin 2024Des corps de migrants sont régulièrement récupérés sur les côtes italiennes à la suite de naufrages.
L'Allemagne est pour sa part agitée par un débat sur les expulsions de migrants. Tandis que le président américain veut régulariser des centaines de milliers d'immigrés. Le thème de la migration préoccupe au plus haut point les pays occidentaux, sur fond d'une montée en puissance des opinions d'extrême droiteopinions d'extrême droite.
Au sein de l'Union européenne, les 27 pays membres s'apprêtent à présenter, d'ici décembre, leur plan d'application du Pacte sur la migration et l'asile, une vaste réforme qui durcit le contrôle de l'immigration dans le bloc. Parmi les stratégies phares figurent des accords avec des pays d'accueil tels que la Tunisie.
Une stratégie dénoncée
Le vice-président de la Commission européenne, Margaritis Schinas, a plusieurs fois rassuré les défenseurs des droits de l'Homme, qu'un système sur le modèle de l'accord entre le Royaume-Uni et le Rwanda n'était "pas possible dans l'Union européenne".
En revanche, il défend les accords passés par Bruxelles avec des pays tiers comme la Tunisie et l'Egypte. Ces accords visent à empêcher les départs vers l'Europe.
Le problème que posent les défenseurs des droits de l'Homme, c'est qu'un pays comme la Tunisie est dirigé par un président, Kais Saïed, critiqué pour ses dérives autoritaires et une certaine brutalité policière à l'égard des migrants subsahariens.
Mamadou, un migrant originaire du Tchad, explique à la DW que la Tunisie n'est pas sa destination finale. "Je suis ici depuis trois mois et je vis très mal ici. La Tunisie n'est pas notre objectif. On ne veut pas rester ici. Nous voulons juste passer. On nous appelle ici "les Africains". C'est comme si la Tunisie ne faisait pas partie de l'Afrique. Ce sont eux parfois, les garde-côtes, qui provoquent des naufrages", regrette-t-il.
L'Union européenne face à un dilemme
L'UE et la Tunisie sont liées par un accord de coopération évalué à un milliard d'euros. Une partie de cette enveloppe, 105 millions d'euros, est destinée à freiner l'immigration irrégulière en Europe depuis le pays côtier.
Or, le président tunisien Kais Saïed est un partenaire difficile qui montre aussi à l'Union européenne que la Tunisie est capable de trouver d'autres alternatives, par exemple en Iran.
La recherche d'une solution à la migration irrégulière est donc tout aussi difficile. "Lorsqu'ils arrivent en Europe, leur seule chance de rester légalement est de demander l'asile. Mais plus de la moitié d'entre eux ne remplissent pas les conditions requises pour obtenir le statut de réfugié en Europe", explique Vincent Kochel, envoyé spécial des Nations unies pour la Méditerranée occidentale et centrale.
Il explique pourquoi l'Europe choisit de signer des accords avec des pays tiers pour recevoir des migrants expulsés : "Ils (les migrants, ndlr) finissent donc par se retrouver en situation irrégulière en Europe et devraient pouvoir retourner dans leur pays d'origine. Mais la coopération avec les pays d'origine est très difficile. Ils ne veulent pas reprendre leurs citoyens. C'est pourquoi nous avons tant de problèmes. Des problèmes qui ne sont pas spécifiques au système d'asile, mais plutôt au fait que ceux qui n'ont pas besoin d'asile ne retournent pas dans leur pays d'origine."
Outre la Tunisie et l'Egypte, l'Union européenne coopère avec la Mauritanie. Nouakchott bénéficie d'un appui d'une valeur de 210 millions d'euros pour empêcher les départs de migrants vers l'Europe, depuis son territoire.