Impasse politique au Mali
20 juillet 2020Les recommandations des médiateurs de la Cédéao, dont l’équipe était dirigée par l’ancien président nigérian Goodluck Jonathan, n’ont pas intégré certaines demandes essentielles du mouvement de contestation. Parmi ces demandes figurent la dissolution de l’Assemblée nationale, la nomination d’un premier ministre issu de ses rangs et surtout, le départ du président Ibrahim Boubacar Keïta.
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"Une fois l'Assemblée dissoute, un premier ministre consensuel désigné, un gouvernement composé de technocrates mis en place, beaucoup de proches d'IBK (Ibrahim Boubacar Keïta) qui sont cités dans des malversations financières seront trainés devant les juridictions. Donc, tout cela explique pourquoi aujourd'hui le président Keïta se trouve dans un dilemme. Faut-il répondre favorablement aux différentes doléances du M5 (Mouvement du 5 juin), quitte à faire entorse aux institutions de la République ? Ou faut-il continuer à rester dans le déni tout en restant avec ses lieutenants, quitte à rester au pouvoir de façon symbolique ? Je pense que c'est cette deuxième hypothèse qui serait aujourd'hui celle soutenue par le président Keïta", soutient Aly Tounkara, directeur du Centre des études sécuritaires et stratégiques au Sahel.
Unité fragile
Selon Jean-Claude Kassi Brou, le président de la Commission de la Cédéao, l'imam Mahmoud Dicko, considéré comme l’autorité politique et spirituelle de la contestation, aurait "accepté les grandes lignes des recommandations" de la médiation.
Si cette information venait à être confirmée, elle pourrait sonner le glas de l’unité du M5, estime Ibrahim Maïga, chercheur à l'ISS, l'Institut d'études de sécurité, basé à Bamako.
"Aujourd'hui, par exemple, à Bamako, on est en train d'assister à quelques manifestations, avec des barricades dans les rues, à certaines intersections. C'est l'action surtout d'une frange du M5 qui n'adhère pas du tout aux propositions formulées par la Cédéao. Mais, au sein de ce mouvement, vous avez aussi des tendances qui semblent plus ou moins favorables au dialogue et à la négociation avec le gouvernement. C'est-à-dire, si l'imam Dicko prend une position en faveur de la négociation et du dialogue avec le pouvoir, on peut effectivement voir apparaitre au grand jour des fissures importantes au sein de ce mouvement", explique le chercheur.
Une grande partie du sort du M5 et de l’évolution de la situation dépend de l’imam Mahmoud Dicko qui est le dénominateur commun de tous les opposants au président Ibrahim Boubacar Keïta, en conclut Ibrahim Maïga.