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Gerhard Schröder jette l'éponge de Rosneft et Gazprom // L'antisémitisme en hausse en Allemagne

Vu d'Allemagne
25 mai 2022

Il quitte le conseil d'administration de Rosneft et refuse celui promis par Gazprom... L'ancien chancelier allemand Gerhard Schröder a-t-il fini de susciter la polémique avec ses engagements dans des entreprises russes ? // En Allemagne, l'antisémitisme a augmenté avec la pandémie... Notre correspondant a rencontré un jeune juif berlinois qui raconte son expérience avec la haine antisémite.

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Avez-vous déjà entendu cette expression : la "schröderisation" de la politique ? On l'utilise au sujet d'anciens hauts responsables politiques européens devenus lobbyistes pour de grandes entreprises russes, suivant l'exemple de Gerhard Schröder, après la fin de son mandat de chancelier en 2005. 

Les revenus des divers engagements de Gerhard Schröder en Russie étaient estimés à environ un million d'euros
Les revenus des divers engagements de Gerhard Schröder en Russie étaient estimés à environ un million d'eurosImage : Getty Images/AFP/E. Piermont

Le job en vaut la peine : les diverses activités de l'ex-dirigeant allemand en Russie lui rapportent environ un million d'euros par an ! Ou plutôt lui rapportaient. 

La semaine dernière, Gerhard Schröder a informé la société Rosneft, numéro un russe du pétrole, qu'il ne pourrait pas prolonger ses fonctions de président du conseil d'administration. 600.000 euros qui partent en fumée, on comprend mieux pourquoi l'ancien chancelier, qui a eu 78 ans début avril, a eu du mal à prendre cette décision.

Cette semaine, nouvelle annonce : alors que Gazprom vient de confirmer sa nomination à son conseil, l'ex-dirigeant allemand décline l'offre russe.

La pression a eu raison de Schröder

Il faut croire que la pression a fini par être trop forte pour Gerhard Schröder, lui qui n'a amais caché son amitié pour Vladimir Poutine et estimait encore, fin janvier dans son podcast "Die Agenda", que les mouvements de troupes russes à la frontière ukrainienne ne signifiaient pas une invasion imminente de la Russie.

"Je ne le pense pas et je ne pense pas non plus que les dirigeants russes puissent avoir un quelconque intérêt à intervenir militairement en Ukraine."

Après le massacre de Boutcha, Gerhard Schröder a affirmé au New York Times que les ordres ne pouvaient pas venir du président russe - qui a pourtant récompensé les soldats déployés pour cette mission
Après le massacre de Boutcha, Gerhard Schröder a affirmé au New York Times que les ordres ne pouvaient pas venir du président russe - qui a pourtant récompensé les soldats déployés pour cette missionImage : Carol Guzy/Zuma Press/dpa/picture alliance

Dans le podcast "Die Agenda", lancé en 2020, Béla Anda, ancien porte-parole de Gerhard Schröder, lui donnait la parole sur la politique mondiale à raison d'environ un épisode tous les quinze jours. Le dernier numéro date du 4 février. Béla Anda a mis fin début mars à cette collaboration.

Début mars, c'est également le moment où les choses ont commencé à se compliquer sérieusement pour Gerhard Schröder, critiqué pour ses liens avec Vladimir Poutine et les grands groupes russes. 

L'ancien chancelier s'est vu retirer ses titres de membre d'honneur des clubs de football de Hanovre et Dortmund, puis de la Fédération allemande de football, mais aussi de citoyen d'honneur de la ville de Hanovre.  

Son parti politique, le SPD, et même son camarade et actuel chancelier Olaf Scholz, l'ont appelé plusieurs fois à démissionner de ses fonctions mais rien n'y a fait. L'ex-chancelier a fait la sourde oreille.

Le 10 mars, il s'est rendu de son propre chef à Moscou pour tenter une médiation avec Vladimir Poutine, mais celle-ci n'a pas porté les fruits escomptés.

Fin des privilèges et menaces de sanctions

Les appels se sont multipliés depuis février pour que Gerhard Schröder soit sanctionné pour ses liens avec le président russe
Les appels se sont multipliés depuis février pour que Gerhard Schröder soit sanctionné pour ses liens avec le président russeImage : JOHN MACDOUGALL/AFP

C'est la semaine dernière que la pression a atteint son comble : jeudi 19 mai, la commission budgétaire du Bundestag, le Parlement allemand, a voté une résolution qui prive l'ancien chancelier d'une partie de ses avantages : des bureaux dans l'enceinte du parlement et le personnel qui va avec. Cela coûte 400.000 euros par an au contribuable allemand. Et pour le député libéral Otto Fricke, la décision était évidente.

“Ce n'est pas une 'lex Schröder' mais elle est valable pour tous les anciens chanceliers. Nous sommes les gestionnaires de l'argent du contribuable et c'est nous qui disons où on peut le dépenser et où on ne peut pas."

Gerhard Schröder garde pour l'instant sa protection policière et sa pension de retraite d'ex-chancelier, mais l'opposition conservatrice n'a pas encore dit son dernier mot. Depuis les Pays-Bas où il était en déplacement le jour du vote, le chancelier Olaf Scholz a salué la décision du Bundestag, tout en estimant que cela suffisait pour l'instant.

"La décision du Bundestag allemand au sujet de l'ancien chancelier est logique et sera donc appliquée. Je pense que c'est la réaction qu'il fallait et je ne juge pas nécessaire d'aller plus loin pour le moment."

À ce moment-là, Gerhard Schröder n'avait pas encore démissionné de son poste chez Rosneft qu'il occupait depuis 2017. Ce n'est que le lendemain que l'annonce a été faite. 

La veille également, le Parlement européen avait à son tour adopté une résolution prévoyant une extension des sanctions européennes aux "membres européens des conseils d'administration des grandes entreprises russes" ainsi qu'aux "responsables politiques qui continuent de recevoir de l'argent russe". En citant nommément Gerhard Schröder...

De la politique au lobbyisme

Entre Gerhard Schröder et Vladimir Poutine, une amitié ancienne
Entre Gerhard Schröder et Vladimir Poutine, une amitié ancienne (ici aux Jeux olympiques de Sotchi en 2004)Image : Presidential Service/Itar-TASS/AP/picture-alliance

Les critiques au sujet de l'engagement pro-russe de Gerhard Schröder ne datent pas d'aujourd'hui. Il faut dire que l'ex-chancelier n'a pas attendu bien longtemps pour sa reconversion après avoir été battu par Angela Merkel aux élections législatives de septembre 2005.

Dès le mois de décembre 2005, il prenait la tête du comité des actionnaires d'un consortium chargé de construire le premier pipeline Nord Stream pour acheminer du gaz de la Russie vers l'Allemagne.

À l'époque déjà, l'opposition avait vertement critiqué l'ex-chancelier. A l'instar de Wolfgang Gerhardt, chef du groupe parlementaire du FDP en 2005, qui estimait que "l'ancien chancelier Gerhardt Schröder se moque des principes qu'il a défendus en tant que chancelier fédéral avec le soutien actif des sociaux-démocrates."

Dans un débat diffusé fin avril sur la chaîne publique Phoenix, un ancien conseiller politique de Gerhard Schröder a confirmé que les principes n'ont jamais guidé Gerhard Schröder une fois son mandat terminé.

"Gerhard Schröder a dit plusieurs fois ouvertement que la fin de son mandat signifiait pour lui que le boulot était terminé", explique Frank Stauss. "Il n'a pas occupé ce poste dans la perspective de prolonger la dignité de la fonction au-delà de son mandat."

Gerhard Schröder a joué un rôle central dans le développement de Nord Stream 1 et 2 en Allemagne
Gerhard Schröder a joué un rôle central dans le développement de Nord Stream 1 et 2 en AllemagneImage : picture-alliance/dpa/S. Sauer

Différence notable entre 2005 et 2022, c'est qu'à l'époque le parti social-démocrate s'était rangé derrière son ancien chef. Quant à la chancelière Angela Merkel, pourtant du bord politique opposé, elle a par la suite fait appel à Gerhard Schröder pour développer les projets de gazoducs Nord Stream 1 et Nord Stream 2, dont elle a directement accompagné la construction et qui a été suspendu depuis le début de la guerre en Ukraine.

Mais la guerre en Ukraine a changé la donne. La démission de Gerhard Schröder du conseil d'administration de Rosneft et son refus de siéger dans celui de Gazprom marquent peut-être la fin du "cas Schröder", devenu très encombrant pour l'Allemagne.

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L'antisémitisme une expérience quotidienne en Allemagne

Le jeune Berlinois Monty Ott ne porte plus sa kippa en public depuis qu'il s'est fait agresser
Le jeune Berlinois Monty Ott ne porte plus sa kippa en public depuis qu'il s'est fait agresserImage : Maja Hitij/Getty Images

Vu d'Allemagne, deuxième partie... Et on reste en Allemagne, où le phénomène de l'antisémitisme, c'est-à-dire la haine contre les juifs, devient de plus en plus inquiétant. 

Un des cas les plus marquants de ces dernières années a été l'attentat de Halle, en 2019, lorsqu'un extrémiste de droite a voulu s'attaquer à la synagogue le jour de Yom Kippour pour faire un carnage. La porte lui a résisté, mais il a tué deux personnes et en a blessé gravement deux autres aux alentours de la synagogue. 

Mais il y a aussi les actes antisémites du quotidien. Ils n'ont jamais été aussi nombreux qu'en 2021 et selon un rapport récent, près d'un Allemand sur quatre - certaines études disent même un Allemand sur trois ! - pensent que les juifs ont trop d'influence en Allemagne.

Notre correspondant Niklas Mönsch a rencontré un jeune juif berlinois pour se rendre compte de ce que signifie la confrontation avec l'antisémitisme dans une grande ville comme Berlin. 

 

Vu d’Allemagne est un magazine radio hebdomadaire, proposé par Hugo Flotat-Talon et Anne Le Touzé, diffusé le mercredi et le dimanche à 17h30TU, et disponible aussi en podcast. Vous retrouveztous les numéros dans la médiathèque, à écouter en ligne ou à télécharger en format MP3. Le podcast est également disponible sur certaines plateformes de podcasts.

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Politique, économie, histoire... Vu d'Allemagne est un podcast hebdomadaire sur l'Allemagne, avec un grand reportage international en seconde partie d'émission.