Viktor Orban en "mission de paix" suscite l'ire de Bruxelles
11 juillet 2024Il n’a fallu qu’une semaine à Viktor Orban pour donner raison à tous ceux et celles qui voyaient d’un mauvais œil la Hongrie prendre la présidence tournante de l’Union européenne.
Depuis le 1er juillet, le Premier ministre hongrois, soutien de Vladimir Poutine et de Donald Trump, est allé défendre, sans en informer Bruxelles, une initiative de paix pour l’Ukraine en se rendant à Kiev, Moscou et Pékin.
Viktor Orban est accusé d’abuser de sa nouvelle fonction, alors que la présidence de l’UE n’autorise pas un pays à s’exprimer au nom des Européens sur la scène internationale.
La communication est travaillée. Sur la page Facebook de Viktor Orban, qui compte plus d’un million de followers, on peut suivre pas à pas ce que le Premier ministre hongrois appelle sa "Mission de la paix".
"2.100 kilomètres. Trois heures de négociations Dix stations-service. 24 heures de trajet. En route vers la paix à Kiev", peut-on lire par exemple dans une des publications, accompagnée d'une vidéo dans laquelle est mise en scène avec dramaturgie la visite surprise de Viktor Orban en Ukraine, un jour à peine après le coup d’envoi de la présidence hongroise de l’Union européenne.
Puis il y a eu l’étape à Moscou, une rencontre avec Vladimir Poutine, sous le coup d’un mandat d’arrêt international. Les deux hommes posent tout sourire sur la photo que Viktor Orban publie sur les réseaux sociaux.
Tollé à Bruxelles
A Bruxelles, on est furieux. Le président du Conseil européen, Charles Michel, rappelle que la Russie est l’agresseur, que l’Ukraine est la victime, et que "la présidence tournante de l'UE n'a pas de mandat pour engager le dialogue avec la Russie au nom de l'UE".
"Si nous restons assis à Bruxelles, nous ne pourrons pas nous rapprocher de la paix", répond Viktor Orban, décidé à poursuivre sa tournée, direction Pékin en début de semaine, un autre allié du Kremlin.
Et voilà qui nous ramène au sommet de l’Otan, où "la mission de la paix continue", comme le clame Viktor Orban à son arrivée à Washington.
Sauf que cette paix, elle ne correspond pas à la vision qu’ont l’Ukraine et ses alliés. A Kiev, le président Volodymyr Zelensky a rejeté l’appel à un cessez-le-feu du dirigeant hongrois. Le président ukrainien veut le retrait total des troupes russes, y compris de la péninsule de Crimée annexée par Moscou en 2014, ce que le Kremlin refuse.
Le trio Orban - Poutine - Trump
Que la proposition de Viktor Orban n’inspire pas confiance au leader ukrainien n’est pas surprenant.
Le Premier ministre hongrois est un proche de Vladimir Poutine, il a freiné les sanctions de Bruxelles contre Moscou, a réussi à soustraire la Hongrie à toute obligation d’aide militaire en faveur de l’Ukraine au sein de l’Otan, et pourrait bien faire capoter le long processus d’adhésion de Kiev à l’Union européenne.
Enfin, Viktor Orban est un admirateur de Donald Trump, celui que l’Alliance atlantique redoute de voir revenir à la Maison Blanche.
L’ancien président est un fervent critique de l’Otan et pourrait imposer, en coupant les vivres à l’armée ukrainienne, des négociations de paix sur la base de la ligne de front actuelle en Ukraine.
Un plan en ce sens aurait été présenté au milliardaire par deux de ses anciens conseillers à la sécurité nationale, selon des informations de l’agence Reuters. Donald Trump aurait réagi favorablement à cette idée.
Une éventuelle victoire à la présidentielle de celui qui a inspiré le slogan "Make Europe Great Again" à la présidence hongroise de l’UE, pourrait bien conforter le rôle de faiseur de paix que revendique Viktor Orban.
Ce dernier a d’ailleurs annoncé qu’il allait rencontrer Donald Trump dans sa résidence en Floride en marge de ce sommet de l’Otan.