L'Allemagne critique le Burundi. Un peu moins le Rwanda.
23 juillet 2015Le président Paul Kagamé est soupçonné de vouloir briguer un autre mandat en 2017 alors que la Constitution ne le lui permet pas. Officiellement, il ne se prononce pas sur le sujet, mais son parti dégage déjà la voie. Récemment, un obstacle important a ainsi été levé : le Parlement a appelé à un référendum sur une modification de la Constitution.
Pays modèle
En raison de sa stabilité, de son succès économique et de ses réformes sociales ambitieuses, le Rwanda est souvent présenté comme un pays modèle en Afrique - même du point de vue du gouvernement allemand. Dans une interview accordée à un journal local l'ambassadeur d'Allemagne au Rwanda Peter Fahrenholtz s'était montré quelque peu optimiste en ce qui concerne la situation politique du pays et avait montré moins de compréhension en ce qui concerne le Burundi. Cela n'a pas manqué de susciter des réactions. Stef Vandeginste est politologue et enseignant à l'Université d'Anvers en Belgique : " L'interview suggère qu'on est dans un cas de figure où d'un côté, on a un homme exemplaire et de l'autre, quelqu'un qui ne l'est pas. La question est de savoir si la démocratie et les droits de l'homme sont plus respectés au Rwanda qu'au Burundi? Y a t-il plus de liberté d'expression, une presse plus libre et mieux protégée? Y a t-il une société civile robuste? L'opposition peut elle s'exprimer plus librement ? Je ne pense pas. "
Des déclarations comme celle de Peter Fahrenholtz sont désastreuses pour la crédibilité des partenaires au développement, prévient le professeur Vandeginste. Selon lui, le message envoyé aux civils qui se battent pour la démocratie dans leur pays est le suivant : "ne comptez pas sur nous."
La réalité est moins rose
Dans l'un de ses rapports sur le Rwanda, Amnesty International dénonçait les restrictions de liberté et la persécution des opposants au régime. Parmi eux, le journaliste Fred Muvunyi. Ancien président de la Commission rwandaise des médias, il s'est récemment réfugié en Europe. Extrait de la première interview qu'il a accordé après sa fuite :
"Je devais partir en exil, parce que les citoyens n'ont aucun droit dans mon pays, même s'il n'y a pas de guerre ou de conflit ouvert. Il est vrai que le Rwanda a fait de grands progrès et peut être apprécié pour cela mais maintenant, nous voulons aussi une ouverture politique et la démocratie"
Fred Muvunyi avertit par ailleurs qu'un amendement constitutionnel pourrait être fatal pour le Rwanda. Il estime que Paul Kagame ne peut pas être éternellement président.