Pegasus : trois journalistes togolais témoignent
28 septembre 2021" Je tombais des nues, j’étais complètement étonné, abasourdi… ". Plusieurs mois après les révélations autour du logiciel espion Pegasus, le journaliste togolais, Luc Abaki s’interroge toujours sans avoir un début de réponse à ses questionnements. " J’étais encore plus choqué, lorsque j’ai appris les sommes faramineuses que ces pratiques ont pu coûter à mon pays. Lorsqu’on me parle de milliards de francs CFA pour acquérir un logiciel comme celui-ci, pendant que l’écrasante majorité de la population togolaise est dans le besoin, c’est tout à fait choquant " poursuit-il.
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Une enquête menée par Amnesty international et le réseau Forbidden stories a révélé que 300 numéros togolais apparaissent dans la liste des cibles potentielles du logiciel espion israélien, Pegasus. Parmi ces numéros, ceux de Luc Abaki et deux autres journalistes togolais.
Indignation
Comme Luc Abaki, Ferdinand Ayité le directeur du journal togolais L’Alternative a également été la cible du logiciel espion.
" Pegasus n’est pas un système normal d’écoute. C’est carrément, un système d’espionnage. On prend le contrôle de votre téléphone, on vous suit partout, on peut activer le micro. Et donc, vous n’avez pas de vie privée, vous n’avez pas d’intimité. On essaie de voler des données dans votre téléphone. Il est inadmissible que des gens puissent prendre le contrôle de votre téléphone, aspirer des données " s'insurge t-il.
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Carlos Kétohou, le troisième journaliste ciblé, a fui le Togo depuis plusieurs mois. Egalement défenseur des droits de l’Homme, il avoue avoir eu très peur quand il a appris être la cible de ce logiciel.
" Je me suis senti en danger. Je garde aujourd’hui, les séquelles des chocs que j’ai eu en ayant cette information. J’ai réalisé à travers cet espionnage que toutes mes sources d’information, toutes les enquêtes menées, toutes les victimes d’abus que j’ai approchées sont dans la ligne de mire de cet espionnage et c’est très grave. Et j’ai compris pourquoi, à la fin de l’année 2020, j’ai été enlevé durant la nuit à mon domicile, détenu, puis relâché après cinq jours avec naturellement le retrait du récépissé de mon journal. C’est très grave ".
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Les journalistes et d’autres victimes ont décidé de porter plainte contre l’entreprise israélienne NSO Group qui a développé ce logiciel ainsi que contre les utilisateurs, l’Etat togolais dans ce cas. Mais depuis l’éclatement de ce scandale, les autorités togolaises ne sont toujours pas prononcées officiellement.